Le fils de Frankenstein (1939) de Rowland V. Lee avec Boris Karloff, Basil Rathbone, Bela Lugosi. (Éditions Elephant Films) Sortie en DVD le 21 octobre 2015

Marathon Frankenstein (1)

Béni soit le nom des éditions Elephant qui inaugurent une nouvelle collection consacrée aux grandes figures monstrueuses du cinéma fantastique. En attendant l'arrivée de Dracula, de la momie, de l'homme invisible et autres réjouissances, voici venir cinq films consacrés au mythe de Frankenstein.

 

Après les deux immenses classiques réalisés par James Whale (Frankenstein et La fiancée de Frankenstein), la Universal relance la saga après le coup d'arrêt porté au genre en 1936 par l'éviction de Carl Laemmle qui avait su lui donner ses lettres de noblesse. Réalisé par le prolifique mais assez méconnu Rowland V. Lee, Le fils de Frankenstein est le troisième épisode de la série et reprend les choses où elles s'étaient arrêtées.

Cette fois, c'est le fils de Frankenstein qui débarque dans une petite bourgade traumatisée par les événements passés. Très vite, il prend connaissance des travaux de son père et se lie avec Ygor, l'ancien assistant du baron, qui lui montre que la créature n'a pas été détruite mais qu'elle est plongée dans une sorte de coma. Comme bon sang ne saurait mentir, Wolf Frankenstein va tenter de ramener à la vie le monstre...

Le film séduit d'abord par le soin accordé à la mise en scène. Il s'inscrit parfaitement dans la lignée des films fantastiques du studio avec ce goût pour les atmosphères macabres (grandes demeures inquiétantes, violents orages, pluies diluviennes...). Lee utilise de manière très habile ses décors, en particulier cette immense salle à manger où se retrouve le couple pour dîner. En jouant sur des éclairages violemment contrastés et obliques, le cinéaste accentue les ombres portées (notamment celles d'un grand escalier) et donne à son film un cachet expressionniste, biscornu et vraiment intéressant.

 

Quand le film retrouve ensuite les chemins balisés par ses prédécesseurs (le savant « fou » qui tente de réanimer la créature), il accuse parfois un petit coup de mou. Mais à cette (petite) réserve près, il est passionnant. D'abord parce qu'il permet de retrouver l'immense Karloff dans le rôle de la créature. Alors qu'il ne fait quasiment rien en terme de jeu, le comédien parvient à faire passer de nombreuses émotions, notamment parce que le cinéaste joue sur les réminiscences des épisodes précédents : un inspecteur qui a eu autrefois le bras arraché par la créature, le fils de Wolf qui croise la créature et qui rappelle la petite fille qui terminait à l'eau...

L'un des autres points forts du film est l'arrivée de Bela Lugosi, méconnaissable dans le rôle d'Ygor. Avec une personnalité aussi forte, les enjeux du film se déplacent un peu : alors que le descendant de Frankenstein s'intéresse à la dimension scientifique du projet à la manière de son ancêtre (être capable de rivaliser avec Dieu en donnant la vie à une créature inerte) ; Ygor cherche à assouvir sa vengeance envers des villageois qui l'ont laissé pour mort après l'avoir pendu. Du coup, c'est ce personnage qui prend l'ascendant sur la créature et devient son maître, réduisant le rôle du fils de Frankenstein à celui de faire-valoir (il devient même, au bout du compte, un véritable « héros »).

 

Entre le désir de la science d'aller toujours plus loin et le surgissement de pulsions sauvages (chez les villageois toujours prêts à lyncher Ygor et la créature), le film trouve en lui des échos inquiétants de l'époque (1939).

 

La séquence finale, au-dessus de ce bassin en ébullition, est très réussie et achève de faire du Fils de Frankenstein un épisode particulièrement recommandable de la longue saga Frankenstein...

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