Porno holocaust (1980) de Joe d’Amato avec Mark Shannon, Lucia Ramirez, Annj Goren, George Eastmann. (Editions Bach Films). Sortie en DVD le 27 avril 2016

L'île nue

Avec un titre pareil, l’amateur de curiosités bis pouvait légitimement saliver d’autant plus que le film s’inscrit dans la « période  Saint Domingue » de Joe d’Amato, ce moment précis où il mêle sans prendre la moindre pincette l’érotisme, l’exotisme et le gore. On s’attendait donc à une synthèse improbable entre Black Emanuelle et Anthropophagous. Le scénario nous y invite puisqu’il narre les aventures d’un groupe de scientifiques devant se rendre sur une île déserte suite à des morts mystérieuses de pécheurs locaux. Des expériences atomiques pourraient être à l’origine de mutations monstrueuses et le groupe cherche à comprendre les raisons de ces meurtres.

Malheureusement, on constate assez rapidement que le travail de synthèse sur différents genres est vite déséquilibré. Comme son nom l’indique, Porno holocaust est, avant tout, un porno hard pas franchement passionnant. Parmi l’équipe de scientifiques se trouvent trois femmes qui annoncent leurs professions (zoologiste, spécialiste de physique nucléaire) dans de saillants petits bikinis. Et très vite, ça copule à tout va ! On débute par une scène lesbienne (relativement) soft puis par une séquence plus corsée qui annonce un célèbre passage du Nymphomaniac de Lars Von Trier puisque la belle se retrouve entre deux beaux Noirs aux attributs avantageux. Scène assez gênante parce que l’actrice a visiblement envie d’être ailleurs ! Enfin, Mark Shannon lutine la belle Lucia Ramirez sur une plage, renvoyant à une scène similaire avec le même couple dans Sesso nero.

Quand tout ce beau monde débarque (enfin !) sur l’île, rebelote ! A nouveau une scène lesbienne et un accouplement entre le célèbre moustachu (Shannon) et l’étoile filante noire Lucia Ramirez, sorte de jolie ersatz de Laura Gemser qui disparut de la circulation après quelques films tournés sous la direction de d’Amato (notamment Orgasmo nero). Tout cela commence à être bien languissant (il faut bien le reconnaître) et au bout d’une heure et dix minutes arrive enfin le monstre qui va décimer toute l’équipe ou peut s’en faut.

Le film décolle un peu même si les effets sanglants sont assez rudimentaires et si le cinéaste se vautre dans les pires clichés du slasher moqués par les Nuls au début de La Cité de la peur. Pour prendre un exemple, lorsqu’ils constatent que des meurtres ont été commis et qu’un monstre rôde aux alentours, les protagonistes ne trouvent rien de mieux que … se séparer et aller se balader dans la forêt ! Sans renoncer totalement à la pornographie, d’Amato la teinte parfois de cette dimension sordide et malsaine qui caractérise souvent son cinéma. Ainsi, le mutant commence par tuer une des scientifiques et la viole ensuite, permettant au cinéaste de nous infliger une scène nécrophile bien crapoteuse.

Au bout du compte, Porno holocaust s’avère un peu décevant, trop axé sur de la simple pornographie pour titiller l’intérêt du spectateur. Même dans sa dimension « gore », il se révèle trop sage et sans cette dimension incroyablement mortifère qui fait le prix de Sesso nero en dépit de ses défauts.

Dans l’entretien qu’il donne en supplément du DVD, Sébastien Gayraud (qui n’aime pas beaucoup le film non plus même s’il le dit ici moins frontalement que dans son livre) souligne néanmoins qu'on retrouve un thème cher au cinéaste (le monstre "pathétique", qui souffre de sa condition) et que l’œuvre annonce d’autres titres plus ambitieux et plus réussis du cinéaste.

Il s’adresse donc en priorité aux amateurs de d’Amato désireux d’arpenter les recoins les plus obscurs de son abondante filmographie.

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