L’Affaire Chelsea Deardon (1986) d’Ivan Reitman avec Robert Redford, Debra Winger, Daryl Hannah, Terence Stamp (Editions Elephant Films) Sortie en DVD et BR le 25 février 2020

© Elephant films

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Le jour de l’anniversaire de ses huit ans, la jeune Chelsea reçoit un tableau dédicacé par son père, un peintre célèbre. Mais cette nuit-là, son existence va basculer. Elle aperçoit d’abord une rixe entre son père et d’autres hommes puis un incendie ravagera sa demeure et la rendra orpheline. 20 ans plus tard, la jeune femme est accusée de vol puisqu’elle a tenté de récupérer le tableau qu’elle estime être le sien et qui est désormais en possession d’une galerie d’art tenue par les anciens associés de son père. Elle fait appel à une remuante avocate (Debra Winger) qui cherche, pour cette affaire, à s’associer avec le redouté substitut du procureur Logan (Robert Redford)…

A partir de ce point de départ, L’Affaire Chelsea Deardon va permettre à Ivan Reitman de jouer sur plusieurs registres. Tout d’abord, celui de l’intrigue policière. Sans être d’une originalité folle (les rebondissements sont assez attendus), force est de constater qu’elle est plutôt bien écrite et rondement menée. On constate d’ailleurs ce que le cinéma américain dit « populaire » a pu perdre en 35 ans. On ne trouvera ici ni débauche de scènes d’action (poursuites en bagnoles, explosions), ni montage épileptique pour doper artificiellement le rythme. Reitman prend le temps (un peu trop parfois : le film aurait gagné à durer un quart d’heure de moins) d’installer les situations, de camper ses personnages. Sa mise en scène est sans génie mais efficace, avec un découpage tout ce qu’il y a de plus classique.

Par ailleurs, si l’armature du récit est policière, le cinéaste joue également sur le registre de la comédie. Il ne s’agit pas tant de truffer l’intrigue de gros gags même si, à un moment donné, Redford se retrouve au centre d’un quiproquo digne de « l’affaire Griveaux » (on le retrouve au lit avec celle qu’il est censé défendre) mais d’aborder l’ensemble avec un ton détaché et amusé. On notera, par exemple, la très jolie séquence de l’insomnie où Logan et Kelly, en montage alterné, tentent diverses méthodes pour trouver le sommeil (l’un fait des claquettes dans la salle de bain tandis que l’autre mange une saucisse à la moutarde et du poulet) et finissent par regarder, chacun de leur côté, Chantons sous la pluie. Mais surtout, Reitman reprend à son compte les ingrédients de la « comédie de remariage » puisque Logan procureur et Kelly avocate sont d’abord adversaires et qu’ils vont finir, bien entendu, dans les bras l’un de l’autre. Effectuer ce rapprochement classique par le biais de la salle de tribunal (L’Affaire Chelsea Deardon emprunte aussi des éléments au « film de procès ») est assez astucieux et fonctionne plutôt bien.

Bien sûr, le film fleure parfois un peu trop les années 80 (la musique synthétique, la chanson de Rod Stewart...) mais, dans l’ensemble, on passe un bon moment en compagnie de bons acteurs. Daryl Hannah est la caution « charme » de l’œuvre, Robert Redford joue sur son côté désinvolte et un peu gauche (notamment dans son rôle de père divorcé) mais ma préférence va évidemment à Debra Winger qui est à la fois très drôle, triviale (voir la manière dont elle se lève avec une gueule de bois) et en même temps d’une élégance absolue.

Tous ces éléments font que L’Affaire Chesea Deardon reste le meilleur film d’Ivan Reitman, cinéaste d’habitude beaucoup moins inspiré (à part les indécrottables nostalgiques des années 80, j’ai dû mal à imaginer qu’on puisse avoir envie de revoir Ghostbusters) et même extrêmement lourdaud (Jumeaux, Un flic à la maternelle). A redécouvrir, donc.

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