Miami vice (2006) de Michael Mann avec Colin Farrell, Jamie Foxx, Gong Li


Michael Mann n'a sans doute jamais lu Baltasar Grácian, sinon il aurait su que « l'affectation est positivement le contraste de la grandeur, parce qu'il y a toujours de la petitesse d'esprit dans celle-là, au lieu que, dans l'autre, il y a toujours de l'élévation, toute naturelle, et toute simple qu'elle est. L'affectation est une sorte de louange muette qu'on se donne, mais que les gens d'esprit entendent comme si on leur faisait tout haut son propre panégyrique ; et se louer soi-même, c'est le moyen de n'être guère loué des autres. ».

Je le disais à propos du très médiocre Collateral, Michael Mann me semble être le Jean-Jacques Beineix de notre époque. Scénarii creux et mise en scène tape-à-l'œil où derrière chaque plan s'entend la voix du cinéaste s'admirant et proclamant tout haut « voyez comme je filme bien ».

Reprenons depuis le début. Soit une série à succès des atroces années 80 (Deux flics à Miami) dont je pense n'avoir jamais regardé un épisode (vous connaissez ma répulsion pour toutes les séries, Dream on, the kingdom et Twin Peaks mises à part).

On reprend les deux flics (incarnés ici par le monolithique Colin Farrell et le musculeux Jamie Foxx, déjà chauffeur de taxi dans Collateral) du feuilleton originel et on les plonge dans une sombre histoire de trafic de stups où nos deux héros devront infiltrer les milieux interlopes pour résoudre l'enquête. Une fois posés les grands axes du récit (à la fois assez creux et emberlificotés pour rien), il n'y a plus rien qu'une longue et monotone succession de plans épate-bourgeois.

L'exercice de style est totalement vain mais, pire que tout, il est d'une laideur sans nom. J'avoue que le concert d'éloges qui accueille chaque nouveau film de Mann me laisse perplexe tant le mauvais goût du cinéaste me semble patent.

C'est un détail mais je ne crois pas avoir entendu depuis longtemps une bande-son aussi hideuse et dépourvue de beauté que celle de Miami Vice (où le cinéaste pousse le vice jusqu'à utiliser la reprise d'un tube merdeux de l'ineffable Phil Collins, presque plus laide que l'original, ce qui n'est pas peu dire !).

Côté mise en scène, c'est exactement la même chose et l'utilisation de la vidéo HD ne change pas grand-chose à l'affaire : photo bleutée et ultra léchée, montage publicitaire (ce n'est pas le cadre ou le point de vue qui importent au cinéaste, juste la joliesse du décorum) et successions de tics hérités plus ou moins de cette esthétique des années 80 dont nous espérions nous être débarrassée à tout jamais. Voyez juste les affreuses scènes d'amour qui sont censées pimenter le film : rien de plus ringard que celle entre Jamie Foxx et sa copine sous la douche, filmée exactement de la même manière qu'un vulgaire Adrian Lyne (inserts esthétisants sur les muscles de l'acteur, eau qui ruisselle sur le visage de la dame...).

Et celles entre Gong Li (pas trop mal, néanmoins) et Colin Farrell sont aussi affligeantes.

Et tout est de cet acabit, il n'y a aucune consistance dans ce film : pas de personnages, pas de fiction (à la limite, juste lorsque naît le dilemme moral envers le personnage de Gong Li et que le spectateur se demande si le flic pourrait passer la barrière pour se ranger, par amour, du côté du Mal), pas de corps, pas de chair...

Miami vice est le prototype même de ce cinéma ripoliné par le « visuel » (comme on disait autrefois pour discréditer des cinéastes pourtant beaucoup plus passionnants que Mann, je pense en particulier à Bertrand Blier) où rien ne frémit sous la surface lisse d'images ultra chichiteuses.

Je suis peut-être trop sévère pour l'œuvre de Mann que je connais peu (mais ses deux derniers opus m'ont fortement déplu) et je me suis sans doute trompé de chaîne hier soir puisque était diffusé sur Paris Première son fort côté Révélations. Nous aurons peut-être l'occasion d'en reparler et ça sera peut-être alors le moment de réhabiliter le cinéaste...

NB : Certains lecteurs ont pu constater des "bugs" sur mes dernières notes. Ces dysfonctionnements n'apparaissent qu'avec Internet Explorer qui, visiblement, ne supporte pas mes copier/coller de Word.

J'ai trouvé une procédure pour essayer de régler ce problème mais un conseil : utilisez Mozilla! (et je ne suis pas actionnaire).

 

Retour à l'accueil