Eternal sunshine of the spotless mind (2004) de Michel Gondry avec Jim Carrey, Kate Winslet, Kirsten Dunst

 

 

 

Contrairement à hier, il ne s’agit pas de la réédition d’une note ancienne mais quasiment d’un remake puisque j’ai retrouvé dans ce film tout le charme et tous les défauts que je percevais dans le tout récent La science des rêves du même Michel Gondry.

Plus « créatif » qu’artiste, le cinéaste part toujours d’une idée très astucieuse en associant dans ce film la notion de mémoire humaine à celle de mémoire informatique. Imaginez que vous ne supportez plus votre conjoint et que vous voulez définitivement le rayer de vos souvenirs. Il vous suffit alors de consulter un médecin qui retrouve dans vos fichiers mémoire tout ce qui concerne votre ex et envoie une par une toutes ces données à la corbeille.

Pour oublier Clémentine (Kate Winslet), Joël (Jim Carrey) s’est prêté à l’expérience et une grande partie du film va nous faire voyager dans la tête de cet homme qui voit soudain s’évaporer tout un pan de sa vie et qui se met à le regretter…

 

 

Avec une telle trame, on imagine ce que le « clippeur » Gondry peut nous offrir : chaque étape de cette remontée à contre-sens sur le flot des souvenirs est traitée comme une saynète autonome où le cinéaste laisse libre cours à son inventivité visuelle. Difficile de ne pas reconnaître que cet homme a un sacré sens de l’imagination (décors mouvants, sautes temporelles, jeu incessant sur la taille des objets et des personnages…) et un univers propre (mélange de haute technologie et d’un côté un peu « vieillot » et « bricolé » qui appelle certainement l’adjectif poétique même si je rechigne à lui attribuer).

 

 

Parce qu’il est conduit de main de maître par un superbe couple d’acteur (Kate Winslet est définitivement une actrice sublime et Jim Carrey n’est pas seulement étonnant (les Farrelly, Milos Forman et Peter Weir nous avaient déjà prouvés qu’il est un grand comédien), il est impérial dans son premier rôle totalement « sérieux ») et parce que son fil directeur tient la route au-delà du côté « gadget », Eternal sunshine se révèle être le meilleur des trois films de Gondry. Et ça serait être de parfaite mauvaise foi que de nier qu’il nous a touché et ému plus d’une fois (même si une analyse froide et rationnelle nous conduirait à pinailler en constatant qu’après tout, si on enlève le côté onirique, le film ne recule devant aucune des facilités du bon mélo qui tache avec les amants qui courent dans les vagues ou qui regardent les étoiles sur un lac gelé).

 

 

Gondry est un malin et un sacré manipulateur qui sait toucher chez le spectateur la corde sensible. Même s’ils n’ont certainement rien à voir, les souvenirs de Joël réveillent forcément en chacun de nous des réminiscences, une scène privilégiée tapie au fond de notre mémoire et que nous aimerions pouvoir revivre indéfiniment. En jouant cette carte là et sur l’émotion que provoquera immanquablement l’idée de temps qui s’enfuit et des regrets que charrient son cours inéluctable ; le cinéaste tape dans le mille. Le film se regarde avec plaisir et ne procure aucun ennui.

 

 

Cependant, je reconnais une fois de plus que tout ça n’est pas franchement ma tasse de thé. Trop de « visuel », pas assez de cinéma comme on disait il y a quelques années ! Je le répète, je sens trop le labeur du « créatif » qui s’échine à trouver un « truc » pour sa saynète plutôt qu’une volonté de créer un vrai récit (qui existe cependant) et lui trouver une véritable forme cinématographique (et non pas un agencement de clips). Tout se passe comme si Gondry avait peur des sentiments de ses personnages, de jouer à fond la carte du mélodrame et qu’il tentait à chaque fois d’introduire une sorte de distance ironique, un regard au second degré très « fashion ».

Il y a beaucoup de pose dans ce film et sans doute pas assez de chair, de sang et de sentiments. Ce n’est presque pas un univers mental mais un univers «virtuel », quelque chose qui oscille entre le factice et un sincère désir d’offrir aux personnages une véritable histoire.

 

 

Sincère et roué, irritant et attachant ; voilà ce qui définit à mon sens les deux derniers films de Gondry (Human nature étant, quand même, très médiocre).

Nous attendons avec curiosité de voir comment va évoluer par la suite ce drôle de bonhomme…

 

 

 

 

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