De l'indépendance...
Garden state (2005) de et avec Zach Braff et Natalie Portman, Ian Holm
Comment se faire définitivement maudire sur huit générations par ma petite sœur en deux notes ! C’est effectivement encore elle qui m’a offert le DVD de Garden state et je peux donc d’ores et déjà deviner son effondrement en constatant que, là encore, ce film n’est pas ma tasse de thé.
A la question : est-il supérieur à I love Huckabees, je répondrais sans hésiter oui. Destiné aux mêmes festivals que celui du film de Russell (c’est tout à fait le type d’œuvre qu’affectionne Sundance) et au même public (jeune, urbain, connecté sur Internet toute la journée mais de sensibilité « artistique »…) ; le film de Zach Brach a le mérite d’être plutôt modeste et sincère en abordant des thèmes graves (le deuil, la culpabilité, les névroses familiales…).
Est-ce que cela fait pour autant un bon film ? A cette deuxième question, je répondrais : n’allons pas si vite en besogne…
Garden state et I love Huckabees (je dis cela pour rassurer ma petite sœur) auront au moins eu le mérite de m’éclairer sur ma propre pratique cinéphile et m’ont permis de me rendre compte à quel point j’ai changé quant au regard que je porte désormais sur le cinéma « indépendant » américain. (Je pense que c’est dans ce domaine que mes goûts ont le plus évolué).
Il y a 10 ans, je ne jurais que par ce cinéma là et je le trouvais, à juste titre d’ailleurs, brillant et inventif. C’était l’époque de Hal Hartley, des premiers Kevin Smith (Clerks) et Todd Solondz, de The doom generation d’Araki, de Clean shaven de Kerrigan et de Safe de Todd Haynes ou même de petite merveille classée sans suite comme Denise au téléphone d’Hal Salwen. A côté de ça, des gens comme Jarmusch ou les frères Coen restaient véritablement des « indépendants ».
Aujourd’hui, il reste, dieu merci, quelques personnalités intéressantes (Wes Anderson) mais ce cinéma s’est figé dans un académisme total et ne conserve d’ « indépendance » que le nom. Un film comme Garden state témoigne parfaitement de cet état de fait.
Le scénario est classique : Andrew retourne dans son New Jersey natal pour assister à l’enterrement de sa mère. On devine des tensions avec son père mais tout change lorsqu’il rencontre la pétillante Sam (Natalie Portman) et qu’il en tombe amoureux…
Derrière un côté un peu décalé (le « décalage » est le maître mot de ce cinéma indépendant) et ses personnages un peu azimutés (le frère de Sam, orphelin noir devenu spécialiste du droit criminel, les potes d’Andrew…), Garden state est un mélo à l’eau de rose tout à fait dans la lignée de Quand Harry rencontre Sally de Reiner (en moins bien).
On sait gré à Zach Braff de tenter de réintroduire dans ce cinéma de tics et d’effets un peu de douleur, un peu de traumatismes enfantins et une critique pas mal vue de la « psychologie » à tout crin (je ne dévoile pas tout mais, suite à un accident, Andrew a été déclaré « dangereux » par son psychiatre de père et il se trouve abruti depuis l’enfance par les médicaments). Malheureusement, la mise en scène ne suit pas. Elle est un peu à l’image de Zach Braff comédien : mollassonne et sans idée. C’est le ronron d’un cinéma totalement classique qui se la joue « artiste » en insistant sur les regards lourds et les plages émotionnelles.
Ce n’est pas franchement désagréable et le cinéaste parvient, à l’inverse de Russell, à nous faire sourire à certains moments. Braff excepté, la distribution est plutôt bien et l’habituellement fadasse Natalie Portman s’avère ici assez convaincante en incarnation de la gaieté et de la joie de vivre. Idem pour Peter Sarsgaard, impeccable dans le rôle du pote compatissant.
Mais sincèrement, c’est aussi vite oublié que vu et ça ne présente pas un grand intérêt…