Le voyage du ballon rouge (2007) d’Hou Hsiao-Hsien avec Juliette Binoche, Hippolyte Girardot

 

Jamais deux sans trois ! Après le dernier opus de Gregg Araki et, dans une moindre mesure, celui de Tim Burton, c’est au tour du grand Hou Hsiao-Hsien de nous décevoir avec son Voyage du ballon rouge, hommage au fameux film pour enfants réalisé par Albert Lamorisse en 1956 le ballon rouge (pas vu !).

Le plus grand reproche que l’on puisse faire à l’auteur des Fleurs de Shanghai, c’est d’avoir réalisé un film français. Qu’il tourne en France, soit ! Ce n’est pas là le problème. Nous pouvions même espérer qu’il serait aussi inspiré que lorsqu’il tournait au Japon, sur les traces d’Ozu, son très beau Café lumière. Mais qu’il adopte, de fait, l’esthétique de patronage de la majeure partie du cinéma « d’auteur » français actuel, voilà qui est intolérable !

Pourtant, le film démarre plutôt bien. Hou filme pendant de longues minutes ce fameux ballon rouge, fil directeur d’une chronique sans réels enjeux, au-dessus de Paris. Il prouve qu’il sait être un grand cinéaste et l’image est vraiment très belle (je parle en terme de cadre, de montage…). Je me demande d’ailleurs si le film n’aurait pas gagné à être muet, pur exercice plastique autour de ce motif flottant que représente ce ballon.

Car dès que ça se met à parler, les choses se gâtent…

Suzanne (Juliette Binoche, blonde peroxydée) vit de son métier de marionnettiste mais, de fait, n’a pas trop de temps pour s’occuper de son fils Simon. Elle engage donc une étudiante en cinéma chinoise pour jouer les gardes d’enfant… Parallèlement, Suzanne entame des démarches pour se débarrasser d’un locataire gênant (Hippolyte Girardot en figurant de luxe)  et retaper l’appartement pour préparer le retour à la maison d’une fille partie faire des études à Bruxelles…

Chronique réaliste et psychologique à la française, donc ! Le spectateur constate dans un premier temps que les gens filmés n’ont pas le même genre de problèmes que le commun des mortels : ils vivent dans de luxueux appartements au centre de Paris et les amis de Juliette Binoche s’appellent Lorenzo et ont des gueules de Frédéric Begbeider ! On s’attend à chaque instant à voir débarquer Christine Angot ou Ariel Wizman tant tout ce petit monde étriqué suinte la bohême bourgeoise et la culture mondaine branchée (écoutez Juliette Binoche parler à l’étudiante du film qu’elle a tourné : c’est une succession de clichés et de platitudes !)

Je sais, je sais ! Je fais du mauvais esprit et je pense sincèrement qu’un film peut-être bon quel que soit le milieu auquel il s’intéresse (je suis par ailleurs certain que le film serait aussi médiocre s’il était situé dans un milieu « prolétaire »). Mais ce qui pêche, c’est l’incroyable indigence de cette chronique. Rarement j’ai vu film aussi peu habité. Hou Hsiao-Hsien échoue a donné la moindre étincelle de vie à ce morne tableau parisien et le résultat paraît incroyablement désincarné, décharné…

Cela se ressent d’ailleurs au niveau du jeu des acteurs : la petite actrice chinoise ne m’a pas paru très à l’aise et elle joue toujours de manière monocorde, ce qui finit par lasser (aucune émotion, aucune intonation, aucun élan…pfff !). Face à elle, Juliette Binoche fait exactement le contraire et surjoue constamment : ça me fait de la peine de l’écrire car c’est une actrice que j’aime beaucoup mais elle est insupportable et plutôt très mauvaise (mais ce jugement provient peut-être du fait que son personnage est indéfendable).

Bref, on somnole gentiment, bercé parfois par le savoir-faire d’Hou (on repère ça et là quelques très beaux plans, magnifiquement composés) mais le résultat est plutôt inintéressant et soporifique…

 

NB : Au rayon déception, j’ai également découvert l’épouvantable Cursed (2005) de Wes Craven, relecture du mythe du loup-garou survitaminée aux effets numériques et aux tics de montage parkinsonien totalement indigne du talent de l’auteur de la colline à des yeux ou des Griffes de la nuit.

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