Fort invincible (1951) de Gordon Douglas avec Gregory Peck, Ward Bond, Lon Chaney Jr (Editions Artus Films)

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Gordon Douglas n'est pas forcément un cinéaste très reconnu mais il s'agit indéniablement d'un honnête artisan hollywoodien ayant œuvré dans tous les genres. Au cœur d'une filmographie foisonnante, les cinéphiles gardent en mémoire son excellent film de science-fiction Them (Les monstres attaquent la ville), grand classique du film de « monstres » hanté par le péril nucléaire. Mais il s'est aussi illustré dans le burlesque (il a fait tourner Laurel et Hardy), dans la comédie, le film noir (grâce à mes archives, je sais que j'ai vu L'enquête mais je n'en ai plus le moindre souvenir!) et le western.

 

Comme tout bon western, Fort invincible repose sur une série d'oppositions et de dilemmes qui charpentent le récit.

 

Premier dilemme : le capitaine Dick Lance (Gregory Peck, plutôt convaincant) parvient à faire prisonnier un dangereux chef Apache après la mise à sac par les indiens de Fort Invincible. Mais plutôt que de s'en débarrasser, il s'en tient à la Loi et met en danger tout son détachement désormais exposé à des représailles...

Deuxième dilemme : Lance se propose d'escorter le chef jusqu'à un autre fort. Mais son supérieur refuse et lui intime l'ordre d'envoyer un lieutenant qui est à la fois son ami et son rival amoureux. Aux yeux de tous, le capitaine a changé son fusil d'épaule pour éloigner un rival trop entreprenant...

Troisième dilemme : Lance est chargé de retourner à Fort Invincible et de contenir les Apaches en attendant l'arrivée des renforts. Pour cela, il choisit de prendre dans son escadrille tous ses « ennemis » personnels, mettant ainsi sa vie en danger des deux côtés...

 

Si le western repose sur ce genre de dilemme, c'est pour mieux les résoudre d'une manière « morale » et définir par la suite une certaine idée de la Loi : préférer la justice à la loi du Talion, acquérir une conscience de « soldat » et de citoyen plutôt que de laisser parler les rancœurs personnelles...

Gordon Douglas, c'est entendu, n'est ni John Ford (même si on lui doit un remake de Stagecoach/La chevauchée fantastique), ni Howard Hawks. Mais nous aurions tort de bouder notre plaisir face à ce petit western (le décor en carton pâte laisse parfois entrevoir le manque de moyens) de bonne facture et rondement mené (un poil trop long peut-être : un quart d'heure de moins n'aurait pas été du luxe) qui parvient justement à donner à ces opposition classiques (Loi/Barbarie ; Justice/Vengeance...) une certaine puissance et une ambiguïté bienvenue.

 

Cette ambiguïté, elle concerne surtout le personnage de Lance, officier inflexible et impitoyable qui semble délibérément se mettre dans le pétrin. La partie la plus intéressante du film est peut-être celle où la mission de ces hommes semble se transformer en une véritable « opération suicide ». Au point que les hommes soupçonnent leur supérieur de l'avoir organisée suite à la mort de son lieutenant et aux remords qu'elle aurait provoqués chez lui.

 

Fort invincible surprend parfois par sa noirceur et son côté presque absurde qui voit s'affronter une poignée d'hommes contre des hordes d'indiens sauvages (pour le coup, le film est très manichéen et la vision des Apaches est aussi simpliste que caricaturale) avant l'arrivée providentielle de la cavalerie.

Séduit également la galerie de personnages entourant notre héros tourmenté : l'excellent Ward Bond en caporal amoureux de la bouteille de whisky ou encore Lon Chaney Jr. en infâme traître qui finira par se rallier à la cause de Lance...

 

Solidement charpenté et mis en scène, ce petit western sans mauvaise graisse fera la joie de tous les amateurs du genre...

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