Et pour quelques dinosaures de plus...
La planète des dinosaures (1978) de James K Shea avec James Whitworth, Pamela Bottaro, Harvey Shain, Max Thayer (Editions Artus films)
L’île inconnue nous avait séduit par son côté naïf et totalement désuet, réminiscence antédiluvienne d’un cinéma hanté par les aventures exotiques et les créatures mystérieuses.
Si La planète des dinosaures s’avère, à sa manière, un véritable régal ; c’est sans doute pour des raisons beaucoup moins avouables et notamment, disons-le tout net, parce qu’il s’agit sans doute d’un des films les plus « ringards » de toute l’histoire du cinéma.
Il existe beaucoup d’autres films plus hasardeux et moins bien ficelés que celui-ci (songeons à ceux d’Ed Wood, Sam Newfield, Phil Tucker et j’en passe) mais toutes ces séries Z n’ont pas cette patine « kitsch » que les délicieuses années 70 donnent à ce fleuron (les tenues des interprètes sont déjà tout un poème !).
Dans le supplément qui accompagne ce film, le cinéphage Christophe Lemaire (toujours vautré sur son canapé et muni d’antisèches mais néanmoins beaucoup plus drôle et inspiré que lors de son intervention sur l’un des bonus « Eurociné ») n’a pas tort de souligner que La planète des dinosaures est presque un film « d’amateurs » qui parvient pourtant à être assez convaincant lorsqu’il s’agit de donner naissance à ces dinosaures.
Pourquoi amateur ? D’abord parce qu’il s’agit de l’unique film de l’obscur James K Shea et qu’on ne retrouve sa trace (sur IMDB) que comme directeur de la photo sur un (probable) nanar de Stephen Apostolof (ouch !) l’inoubliable auteur sous son pseudonyme habituel d’AC.Stephen d’Orgy of the dead ; et sur The scavengers, mémorable western érotique de l’excellent Robert L. Frost (je ne suis pas d’accord avec Lemaire qui le considère comme le plus mauvais cinéaste du monde : n’a-t-il jamais vu un film de Tony Scott ou de Joël Schumacher ?). Ensuite parce que les comédiens sont tous exécrables sans exception et l’on aura du mal à trouver un nom qui parvint à sortir du lot (les amateurs de cinéma d’horreur reconnaîtront néanmoins celui de James Whitworth, à défaut de reconnaître son visage, qui incarnait Jupiter dans La colline à des yeux de Wes Craven).
Et bien malgré ce côté bricolé et totalement fauché (chapeau aux éditions Artus qui ont fait un véritable travail de restauration même si cela renforce les ratés du côté des raccords lumière du film !), il faut également concéder que l’animation des monstres préhistoriques ne manque pas de charme (c’est du bon « stop motion » à l’ancienne, dans la droite lignée –toutes proportions gardées- d’un Willis O’Brien ou d’un Ray Harryhausen) et qu’ils sont d’ailleurs plus expressifs que les acteurs braillant qu’ils embrochent sans vergogne.
Pour le reste, le scénario est un petit bijou dans son genre. Voyez plutôt : un équipage d’astronautes, suite à une défaillance technique, se voit contraint d’atterrir en catastrophe sur une planète inconnue qui, heureusement, a une atmosphère semblable à la notre.
Sur la plage où ils débarquent, deux d’entre eux décident de retourner dans l’eau pour aller chercher un émetteur radio. Un monstre en profite pour faire son festin et dévore sa première victime (une jolie et plantureuse jeune femme qu’on regrette de perdre si rapidement). Ses compagnons, « bouleversés », trouvent le mot le plus juste en cette circonstance : « Je crois qu’on peut faire une croix sur la radio » (sic ! sympa les amis !).
Tout le film est de cet acabit et traversé par ce type d’humour involontaire. Il faudrait tout citer mais le temps nous est compté. Contentons-nous de ce moment où l’équipage décide de grimper en haut d’une montagne pour échapper aux dinosaures parce que, dixit l’un des membres du groupe, « je les vois mal faire de la varappe » (certes !). Ou encore cet enclos qu’ils construisent avec deux pauvres morceaux de bois censés les protéger de terribles tyrannosaures ou tricératops !
Comme à l’effort succède le réconfort, nos valeureux rescapés parviennent même à faire fermenter du jus de baies (!) pour se saouler ! On ne s’ennuie décidément pas sur cette planète !
Et puis il y a cette musique électronique omniprésente qui ferait presque trouver écoutable l’immonde BO de Flash Gordon (signée Queen), ce prélude spatial admirablement kitsch (à côté, Star Trek, c’est du Bresson !) et, je le redis, ces tenues tout à fait adaptées à une mission intergalactique (entre le pantalon pattes d’eph’ taille basse de l’une et la croquignolette minirobe bleue de l’autre- qui ne vaut quand même pas celle d’Anne Francis dans Planète interdite !).
J’ai l’air de me moquer mais l’ensemble est très sympathique et très marrant. Voilà une nouvelle raison de bénir le travail de la maison Artus qui exhume ces trésors avec acharnement et qui parvient ainsi (merci ! merci !) à les sauver des oubliettes de l’histoire du cinéma…
La planète des dinosaures - trailer
envoyé par apparitor. - Court métrage, documentaire et bande annonce.
NB : Je ne suis pas certain de pouvoir faire une nouvelle note d’ici la fin de la semaine (un coffret Straub que je ne commenterai pas ici m’attend). Du coup, je vous signale que mon ami Vincent m’a fait le grand honneur de me réinviter à Nice pour ses Rencontres cinéma et vidéo (du 18 au 21 novembre). J’aurai le redoutable privilège de présenter un programme de films de Gérard Courant le samedi après-midi et vous pourrez débattre avec le cinéaste après la projection. Alors niçois, niçoises (surtout !), venez nombreux au cinéma Mercury ce samedi après-midi !