Jusqu'en enfer (2009) de Sam Raimi avec Alison Lohman, Justin Long

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Pour Sam Raimi, Jusqu'en enfer marque un retour aux sources puisqu'on sait que le cinéaste débuta en fanfare sa carrière en signant, avec trois bouts de ficelle et beaucoup d'inventivité, un film d'horreur devenu mythique (Evil Dead) avant de se retrouver à la tête de la franchise Spider-Man, reprise récemment par Marc Webb.

Retour au cinéma de genre donc, avec ce film qui met une scène une jeune banquière ambitieuse (elle souhaite devenir assistante de direction) qui refuse de prolonger son crédit immobilier à une vieille femme menacée d'expulsion. La gitane lui lance alors une malédiction et voilà notre héroïne hantée par l'esprit maléfique de Lamia...

 

D'une certaine manière, le cauchemar que vit Christine évoque à la fois celui des adolescents d'Evil Dead (un objet maudit déchaîne les forces maléfiques) mais également L'exorciste lors d'une assez belle séquence où une médium et quelques comparses tentent de se débarrasser du démon. C'est d'ailleurs ce qui séduit d'emblée dans Jusqu'en enfer : un côté presque désuet qui le place dans la lignée de cette horreur « à l'ancienne » que nous goûtions il y a une vingtaine d'années.

Bien sûr, les effets spéciaux bricolés ont laissé place à des effets numériques aseptisés et plutôt laids. Il ne s'agit pas de jouer les passéistes à tout crin mais force est de constater que les progrès qu'ont fait les effets-spéciaux provoquent une certaine déréliction, même au sein d'un genre voué à l'irrationnel et au merveilleux. Tout est désormais possible mais ce « tout » devient de moins en moins crédible dans la mesure où l'on perçoit parfaitement qu'il a été froidement recréé par des ordinateurs, que ces trucages évoluent désormais de manière autonome dans une autre dimension que celle des personnages.

 

Ce côté aseptisé des éléments horrifiques et fantastiques constituent le principal défaut de Jusqu'en enfer. A cela il faut ajouter la composition calamiteuse de Justin Long, acteur qui a le charisme d'un beignet huileux et la présence d'un vague sous-ministre socialiste. La poupée Barbie (Alison Lohman) qui lui donne la réplique n'est pas vraiment meilleure mais elle a le mérite d'être décorative.

 

Ces réserves posées, le film est plutôt plaisant et prouve une fois de plus la bonne santé de Sam Raimi. On sait gré au cinéaste de ne pas hésiter à jouer la carte du mauvais goût et du grand guignol. Cela nous vaut des scènes assez réjouissantes où la vieille gitane perd son dentier et bave toute sorte de substances répugnantes (jaunâtre ou rouge) sur le visage de Christine. De la même manière, celle-ci est embêtée par une mouche qui lui rentre dans les narines avant de s'introduire dans sa bouche et de bourdonner à l'intérieur de son ventre.

On pourrait multiplier les exemples mais nous nous contenterons de citer un très amusant dîner de famille (coincé, comme de bien entendu) chez le petit ami de l'héroïne qui se transforme en un carnaval de visions horrifiques.

 

Que ce soit dans Spider-Man ou dans l'excellent L'armée des ténèbres (le troisième volet de la saga Evil Dead) ; Sam Raimi a toujours utilisé le genre comme laboratoire pour créer des corps hybrides. Dans Jusqu'en enfer, on retrouve dans une certaine mesure le côté carnavalesque de ce cinéma, notamment dans la fameuse séquence d' « exorcisme » où la médium cherche à chasser le Lamia. On peut également percevoir un côté satirique dans cette œuvre : celle qui ne pense qu'à sa carrière et à l'argent sera punie par là où elle a pêché. Quant au cinéaste, après avoir flirté avec les millions de ses « blockbusters », il se paie une petite virée en enfer comme une sorte de rédemption rigolarde et mal élevée.

 

Si le récit est évidemment très improbable, il a le mérite d'être bien mené (un peu plus d'1h30 : voilà qui nous change de toutes ces super-productions boursouflées et creuses!) et de nous réserver un finale plutôt surprenant et réjouissant.

 

Sam Raimi n'a donc rien perdu de son âme et n'a pas dit son dernier mot.

C'est une excellente nouvelle...

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