L’heure zéro (2007) de Pascal Thomas avec François Morel, Danielle Darrieux, Laura Smet, Chiara Mastroianni, Melvil Poupaud

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Depuis La dilettante, j’ai vu tous les films de Pascal Thomas en salles, excepté cette Heure zéro qui m’avait échappé. Ce n’est pas un oubli délibéré de ma part mais certainement un malheureux concours de circonstances puisque j’aime plutôt les adaptations d’Agatha Christie qu’a réalisées le cinéaste. Chronologiquement, L’heure zéro se situe entre les charmants Mon petit doigt m’a dit et Le crime est notre affaire avec le tandem Frot/Dussollier et raconte une sombre histoire de meurtre dans une grande propriété bretonne où la richissime Camilla (Danielle Darrieux) a vu se retrouver son neveu (Poupaud), sa deuxième femme (Laura Smet) et son ex (Mastroianni).

L’une des limites des adaptations d’Agatha Christie au cinéma, c’est qu’elles reposent essentiellement sur des enquêtes destinées à confondre un coupable. Une fois le subterfuge éventé, les films ont tendance à se dégonfler comme des soufflés, faute de mise en scène et d’une véritable atmosphère comme dans les grands films noirs d’antan.

D’un point de vue strictement scénaristique, l’heure zéro s’avère solidement charpenté et happe assez facilement l’attention du spectateur, titillé dans son désir de comprendre les tenants et aboutissants de chacun des personnages (pour ma part, je n’avais pas deviné qui était le coupable mais je suis assez nul au petit jeu des déductions !). 

Fort heureusement, le film ne repose pas que sur son intrigue. Pascal Thomas sait aussi soigner sa mise en scène. Certes, ce n’est pas du Orson Welles mais le classicisme est ici d’assez belle facture : la photo, assez sombre et dominée par des couleurs chaudes est plutôt belle et le découpage est sans bavure.

Encore une fois, rien de bouleversant ou de novateur dans la réalisation mais un sens du cadre, quelques changements d’axe bienvenus et un jeu intéressant sur les regards des personnages (le principe du film, c’est que tout le monde évolue sous le regard de l’autre et que l’assassin se cache nécessairement  parmi les habitants du lieu, ce qui fait de chacun un coupable en substance) font que l’heure zéro échappe à l’esthétique anonyme du téléfilm.

On notera également une jolie direction d’acteur. Ca fait plaisir de voir Danielle Darrieux jouer les vieilles dames indignes qui sait apprécier à sa juste valeur son petit Saint-Émilion et sa… pipe d’opium ! Autour d’elle, Chira Mastroianni joue une femme secrète et angoissée tandis que Melvil Poupaud compose un riche héritier assez convaincant. Mais la meilleure, c’est sans doute Laura Smet dans ce rôle d’épouse râleuse, exubérante et sexy. On aimait déjà énormément l’actrice chez Chabrol et Garrel mais elle prouve ici, dans un autre registre, qu’elle peut tout jouer avec beaucoup de talent (elle est vraiment très drôle).

Pascal Thomas arrive donc à dépasser un peu le cadre de son scénario policier pour nous offrir une atmosphère mystérieuse et une galerie de personnages assez réussie (je n’ai pas cité le policier qu’incarne François Morel avec une agréable désinvolture).

Ce n’est ni un chef-d’œuvre, ni même une œuvre majeure de l’auteur des Zozos et de Mercredi, folle journée mais un film d’artisan honnête, fignolant un produit populaire de bonne qualité à consommer sans modération…

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