Jerry la grande gueule (The big mouth) (1967) de et avec Jerry Lewis

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Interrogez les cinéphiles et vous réaliserez que c’est souvent vis-à-vis des « comiques » que naissent les plus grandes divergences. Certains vont chérir Laurel et Hardy et faire la fine bouche face aux exploits des frères Marx tandis que d’autres ne jureront que par Keaton et qu’en face, on arguera qu’il n’y a pas plus grand que Chaplin…

Méprisé par une certaine frange de la critique (qui le tenait pour un clown grimaçant), Jerry Lewis a également bénéficié d’une véritable aura chez les intellectuels et a même réconcilié les deux revues rivales (Les Cahiers classant très haut The nutty professor dans les meilleurs films de l’année 63 -année du Mépris et des Oiseaux !- tandis que Robert Benayoun de Positif consacrera un livre à Lewis).

Pour ma part, je suis un peu gêné : plutôt bien disposé à l’égard du réalisateur/acteur, je dois aussi concéder que tous ses films ne m’ont pas donné satisfaction. Et à mesure que je découvre ses œuvres, je me demande si je ne préfère pas Lewis quand ce sont les autres qui le font tourner. A mon avis, ce qu’il a fait de mieux, ce sont les films réalisés par Tashlin (ces grandes réussites que sont Artistes et modèles, Un vrai cinglé de cinéma ou Jerry chez les cinoques).

Jerry Lewis réalisateur, le résultat me paraît beaucoup plus inégal. Si The nutty professor (Docteur Jerry et Mister Love) est une réussite indiscutable et si j’aime beaucoup Les tontons farceurs ou Le tombeur de ces dames, je dois avouer que Ya, ya mon général m’a totalement barbé et que One more time (dont je n’ai plus aucun souvenir) m’avait paru totalement raté !

 

The big mouth semble, dans un premier temps, un concentré de l’univers de Jerry Lewis. On y retrouve son goût pour le déguisement et pour les personnages « doubles ». Un brave comptable se trouve ici mêlé à une rocambolesque histoire de gangsters que je renonce à vous résumer (je vois bien que vous vous en fichez éperdument, ingrats lecteurs !). Il y a, sur les 105 minutes que dure le film, quelques passages burlesques très réussis, même si on les a déjà vus dans des œuvres précédentes du cinéaste (ce moment où il s’agrippe à un bateau qui démarre et qui provoque l’allongement démesuré de ses jambes).

Ce qu’il y a de meilleur ici, c’est le côté « cartoonesque » du projet : Jerry Lewis n’est plus un être de chair et de sang, c’est une véritable créature de dessin animé dont le corps et les expressions du visage sont en perpétuel mouvement.

Malheureusement, The big mouth ne finit par reposer que sur ça ! Du coup, si certains instants font rire en touchant de près au nonsense et à l’absurde ; d’autres deviennent un peu pénibles en s’apparentant à un simple concours de grimaces. Comme l’intrigue est assez faible (c’est un doux euphémisme) et que la mise en scène se concentre exclusivement sur les mimiques des personnages, le résultat est un brin monotone et platounet.

Pas de jugement définitif sur Lewis à l’aune de ce titre que je trouve plutôt médiocre et qui m’a assez déçu : peut-être que mes chers lecteurs en auront d’autres à me conseiller pour me réconcilier avec le lunetteux grimaçant ?      

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