Club privé (1974) de Max Pécas avec Denise Roland, Philippe Gaste, Chantal Arondel, Michel Vocoret (L.C.J. Editions). Sortie le 6 juin 2013

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Après avoir évoqué il y a peu le cas du grand José Benazeraf, je suis heureux de me pencher aujourd’hui sur celui de Max Pécas, cinéaste qui n’a jamais eu, jusqu’à présent, l’honneur de mes colonnes (il ne s’agit pas d’ostracisme, bien entendu, mais du hasard des programmations).

Or inutile de dire que nous conservons une certaine tendresse pour celui dont le nom sert désormais d’étalon à tous les plumitifs tentant de qualifier paresseusement un « navet » (« c’est mauvais comme du Max Pécas »). Sans être un fan (doux euphémisme !) de la dernière partie de son œuvre (les « comédies de plage » qui ont fait sa célébrité et les beaux soirs de M6), les deux premières périodes de sa carrière mériteraient sans doute qu’on aille y jeter un œil.

Comme Benazeraf, Max Pécas apparaît aujourd’hui comme l’un des pionniers français du cinéma « sexy ». Dès le début des années 60, il réalise de petits polars qui mériteraient sans doute d’être revus, surtout ceux dont les scénarios ont été écrits par Jean-Patrick Manchette (La peur et l’amour, Une femme aux abois) ou Jean-Pierre Bastid (La main noire). A mesure que les mœurs se libéralisent, il glisse insensiblement vers l’érotisme en signant des œuvrettes qui firent également les beaux jours de la case du dimanche soir de M6 (je pense à l’épouvantable Je suis une nymphomane).

En 1975, le cinéma porno débarque sur les écrans français et comme Don José, Pécas franchit le pas et voit deux de ses films sortir dans des versions hard. Mais contrairement au Condottiere, Pécas ne manifeste aucun goût pour la pornographie (artisan roublard, il est probable que le cinéaste ait suivi la mode de l’érotisme d’abord dans l’espoir bien légitime de toucher le pactole) et se spécialise dès 1977 (Marche pas sur mes lacets) dans la comédie franchouillarde.  

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Club privé pour couples avertis (c’est le titre originel de ce film qui ressort aujourd’hui en DVD sous un titre abrégé) appartient donc à la deuxième période de la carrière de Max Pécas, celle où il œuvre consciencieusement dans le genre érotique en s’encanaillant de plus en plus à mesure que la censure s’assouplit. En 1974, il a plus de liberté qu’en 1971 (l’époque de Je suis une nymphomane) pour déshabiller ses comédiennes même si le résultat reste très soft et ne choquera, au pire, que quelques vieilles rombières versaillaises ou lectrices bornées de Causette !

 

Marcel est chauffeur de taxi et rencontre un beau jour une mystérieuse femme qui l’entraîne dans un club privé où il peut assouvir ses désirs les plus secrets. Tout irait pour le mieux s’il ne réalisait pas soudain que Catherine, sa promise, se produisait également dans ledit club… On soulignera avec le sourire que ce Marcel est particulièrement antipathique et rabat-joie : non seulement il reproche à sa copine ses activités parallèles alors qu’il vient de se taper trois minettes, mais il passe ensuite le plus clair de son temps à condamner ses comparses et leurs vies de débauche ! Il y a chez Max Pécas un vieux fond de puritanisme un peu nauséabond (l’héroïne de Je suis une nymphomane était quand même considérée comme une malade qu’il fallait absolument guérir) que l’on retrouve dans le fil directeur mélodramatique et moralisateur de ce Club privé (où l’amour pur et chaste triomphera).  

 

De la même manière, on retrouve ici l’un des péchés mignons de Max Pécas : ses dialogues ampoulés et assez amphigouriques. Les tirades sur les différences entre « le cœur » et « le cul » valent leur pesant de cacahuètes ! A noter d’ailleurs que les dialogues sont signés Michel Vocoret (qui interprète également un rôle assez important de chauffeur de taxi franchouillard), futur réalisateur des mythiques Qu’est-ce qui fait craquer les filles ? ou encore Comment draguer toutes les filles (ça ne vous fait pas rêver ?).

Ces réserves posées, j’ai eu la surprise de constater que le film n’était pas désagréable. Pécas filme moins bien les corps que Benazeraf mais il fait ici un boulot d’honnête artisan. On perçoit déjà ce qui plaira par la suite dans son cinéma (le côté grivois bien mis en valeur par Vocoret et un ancrage franchouillard assez indéniable – il faudrait vérifier mais je pense que tous ses films comportent au moins un plan de la tour Eiffel- !) mais ce Club privé paraît paradoxalement moins bâclé. Certaines séquences s’avèrent même joliment éclairées et le doux parfum des libertines années 70 (je recommande les moustaches de l’acteur principal mais également les chemises de ces messieurs !) arriverait presque à nous rendre nostalgique (alors que nous ne les avons, en définitive, pas connues sinon enfant !)

A découvrir, donc, en attendant de se replonger plus sérieusement dans l’œuvre du mythique Max…   

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