Visage(s) du cinéma italien : 49- Leopoldo Savona
Les Démons sexuels (1972) de Leopoldo Savona avec Mark Damon, Claudia Gravy
Avant toute chose, il me faut vous parler deux minutes de la manière dont j'ai découvert ce film. Si la copie était plutôt correcte, je l'ai vu en version... allemande (originellement, c'est une œuvre italienne), sous-titré à l'aide d'un logiciel de traduction automatique, ce qui signifie que les personnages passent facilement du tutoiement au voussoiement dans la même phrase, que le « héros » malheureux du récit peut affirmer à sa sœur qu'il n'a pas vue depuis longtemps qu'elle est devenu « très beau » et que des domestiques, après s'être fendus d'un « madame la duchesse », peuvent tutoyer la même personne dans la foulée (je vous fais grâce des phrases incompréhensibles et de la syntaxe improbable de l'ensemble). Bref ! Comme le film débute de manière plutôt nébuleuse, ces conditions ne m'ont pas aidé à rentrer dedans.
Les Démons sexuels est l'avant-dernier film de Leopoldo Savona, obscur artisan du cinéma italien qui débuta à la réalisation dans les années 50 avec des films d'aventures bien oubliés, de guerre ou même des westerns (El Rojo en 1966). Ses faits d'armes les plus « marquants » sont la co-réalisation avec André De Toth (1961) des Mongols et il aurait été conseiller technique sur Mamma Roma de Pasolini.
Pour le film qui nous intéresse ici, soulignons que le titre français, racoleur à souhait, est un peu trompeur. Certes, nous sommes au début des années 70 et les mœurs deviennent plus légères mais l'érotisme du film reste un condiment assez périphérique d'une œuvre qui relève davantage du fantastique. Le titre italien est plus explicite : Byleth : il demone dell'incesto. Tout l'enjeu du récit va tourner autour de cette possession démoniaque (le terrifiant Byleth) et de cette relation trouble qui unit Lionello (Mark Damon) à sa sœur Barbara.
Autant le dire tout de suite, le début de l’œuvre est un peu du grand n'importe quoi : une série de meurtres à laquelle on ne comprend pas grand chose, une enquête anémique... Mais au bout d'un moment, le réalisateur recentre son propos sur cette histoire de démon et parvient à regagner notre attention. Qu'on ne se méprenne pas : rien n'est mystérieux et on comprend immédiatement tout ce qui est en train de se dérouler. Mais cela n'empêche pas le film d'acquérir un certain charme, notamment grâce au trouble qu'il finit par distiller en se focalisant sur la relation incestueuse entre le frère et la sœur.
Malgré ça, il manque un peu plus de rigueur à Savona pour pouvoir faire des Démons sexuels un vrai beau film fantastique, mâtiné de gothique. Ou alors, un peu plus de folie pour rendre le résultat plus baroque, plus délirant et plus déviant. Dans cet entre-deux incertain, nous obtenons un petit film « bis » pas vraiment abouti, plutôt convenu mais pas si désagréable que ça.