Visage(s) du cinéma italien : 85- Riccardo Freda
Liz et Helen (1969) de Riccardo Freda ave Klaus Kinski, Christiane Krüger, Margaret Lee, Barbara Nelli
On ne présente plus Riccardo Freda, l’un des grands noms du cinéma populaire qui débuta sa carrière au début des années 40 et qui parvint à marquer de sa patte les grands genres auxquels il s’adapta. Il fut particulièrement à l’aise dans le film d’aventures historiques (citons le très beau Le Château des amants maudits avec Micheline Presle) et le péplum (trompetons-le sans vergogne, sa version de Spartacus est infiniment supérieure au gros pudding de Kubrick). Mais il s’illustra également dans le mélodrame (Le Chevalier mystérieux, Les Deux Orphelines), le fantastique (Les Vampires, Caltiki, le monstre immortel) et on lui doit deux magnifiques jalons du cinéma gothique (L’Effroyable Secret du professeur Hichcock et Le Spectre du professeur Hichcock). Sa fin de carrière est plus hasardeuse : il s’essaie au western (Quand l’heure de la vengeance sonnera), l’espionnage « pop » (deux épisodes tirés des Coplan de Paul Kenny) et le giallo (L’Iguane à la langue de feu).
Liz et Helen s’inscrit dans cette dernière partie de carrière et met en scène un inquiétant Klaus Kinski qui incarne le gendre d’un riche industriel, unique destinataire de l’héritage familial lorsque meurt son épouse dans un tragique accident d’automobile. Pour oublier la mort d’Helen, John décide de voyager à Londres et, lors d’une soirée où il a été conduit par Christine (Christiane Krüger), il assiste à la projection d’un petit film érotique où il lui semble reconnaître sa défunte épouse (même bague, même cicatrice à la nuque…). Comme des soupçons pèsent sur notre homme, il craint d’avoir été dupé et que son épouse n’ait pas été tuée dans l’accident. Il part alors à la recherche de Liz, son amie et confidente, afin d’en savoir plus…
Classé parfois dans la catégorie « giallo », Liz et Helen n’en présente quasiment aucune caractéristique. Certes, le récit repose sur une forme de machination mais les meurtres sont inexistants ou presque (la seule mort à déplorer est celle d’Helen dans sa voiture) et Freda n’adopte aucun des codes du filon (armes blanches, tueur ganté, traumas anciens…). S’il fallait tenter de rattacher coûte que coûte le film à un filon, c’est plutôt vers le « Krimi » allemand qu’il faudrait se tourner. D’ailleurs, si on en croit la plus célèbre des encyclopédies en ligne, le réalisateur Alfred Vohrer est crédité comme « Edgar Wallace » dans la version allemande de l’œuvre. Il s’agit donc de la rattacher à toute cette série d’adaptations de l’écrivain qui furent réalisées outre-Rhin, produites par la Rialto et où Kinski s’illustra régulièrement. Coproduction italo-allemande, Liz et Helen mêle les attendus du thriller avec une atmosphère qui frise parfois le fantastique (le héros a affaire à une véritable revenante). C’est d’ailleurs cet aspect qui séduit le plus dans ce film soigné. Freda peaufine une atmosphère qui se rapproche parfois du gothique avec un Klaus Kinski déambulant dans sa vaste demeure avec le candélabre à la main.
Pour le reste, le film ne compte pas parmi les grandes réussites de Freda. Le scénario est un peu poussif et les fils utilisés pour faire progresser l’action sont un brin grossiers. Tourné en plein « Swinging London », Freda se laisse gagner par l’atmosphère libérée et hédoniste de l’époque et n’hésite pas à ajouter un (tout) petit piment érotique à son intrigue en dénudant un peu Christiane Krüger et Barbara Nelli. Mais cela ne suffit pas pour dynamiser une œuvre un peu terne et sans grands rebondissements. Ce n’est pas nul et on ne s’ennuie pas (trop). Mais Freda a fait tellement mieux !
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