A hard day's night (1964) de Richard Lester avec Les Beatles (Editions Carlotta) Sortie le 10 décembre 2014

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© Carlotta Films

 

Le temps de deux films, le cinéaste britannique Richard Lester va se mettre au service des Beatles et les mettre en scène dans deux « véhicules » qui permettront au groupe d'aligner leurs chansons et quelques facéties. Help !, découvert il y a quelques années, m'avait plutôt déçu : un scénario inepte et creux tenait lieu de fil directeur à une comédie poussive et à une succession de clips musicaux.

A hard day's night, réalisé deux ans avant, repose sur les mêmes principes (humour absurde et succession de morceaux musicaux) mais le film a le mérite de ne pas chercher à échafauder un récit délirant : les quatre scarabées endossent leurs propres rôles et incarnent les membres d'un groupe de rock au sommet de sa gloire qui s'apprête à enregistrer une émission de télévision.

Ce côté « documentaire » fait la force d'un film qui nous fait ressentir avec une certaine intensité la folie de la « Beatlemania ». Dès les premiers plans, John, Paul, George et Ringo courent à toute allure pour échapper à leurs fans hystériques. A la fin du film, Lester enregistre une prestation « live » du groupe et montre également l'incroyable effet que produisait alors le groupe sur le public (surtout féminin) : hurlements, larmes, sautillements convulsifs... Le charisme du groupe est assez impressionnant et c'est avec un grand plaisir que l'on réécoute leurs chansons, qu'il s'agisse des tubes indémodables (A hard day's night, Can't buy my love...) ou des titres moins connus (du moins, de mon côté).

En plus de la musique, les Beatles manient à merveille le non-sense. Le film est truffé de gags absurdes, de dialogues délirants et de situations burlesques assez drôles dont l'inspiration serait à chercher du côté du magazine Mad (qu'un des personnages lit). A leur côté, il convient de citer le personnage qui incarne le grand-père de Paul McCartney et qui n'a pas son pareil pour semer la zizanie et monter les gens les uns contre les autres. Cela nous vaut une séquence où Ringo se révolte d'être toujours le souffre-douleur des trois autres (ils se moquent régulièrement de son nez) et décide de faire l'école buissonnière. Ce petit aparté est sans doute la partie qui relève le plus de la « fiction » car jusqu'alors, nous avons vu le groupe au cœur d'un quotidien paraissant plausible : aller danser, répéter, courir entre deux trains, deux chambres d'hôtel ou clubs de jeux.

Le personnage du grand-père est intéressant car dans l'une des premières scènes du film, les quatre jeunes hommes raillent son âge tout comme ils opposeront à un autre vieux bonhomme grincheux leur sens de la dérision, leur insolence et la fougue de leur jeunesse. Quatre garçon dans le vent : pour une fois, le titre français n'est pas trop mal choisi dans la mesure où il illustre parfaitement le propos d'un film qui ne cesse d'exalter la jeunesse, son énergie et sa liberté. De manière plus cynique, on pourrait aussi voir dans ce film un parfait véhicule spéculant sur le succès des Beatles et ne visant de ce fait qu'un public « jeune ». Les deux sont sans doute vrai mais c'est cette impureté qui fait le charme d'A hard day's night , mélange de roublardise mercantile et de véritable joie de vivre, d'énergie juvénile et de fantaisie « pop ».

Sans être un chef-d’œuvre, le film brille par son rythme échevelé et par la puissance de ses morceaux musicaux. Quant à l'aspect comédie absurde, voie que le cinéaste Richard Lester empruntera plus d'une fois, il a parfois un peu vieilli mais fait mouche le plus souvent (les stars qui ne s'inquiètent absolument pas de trouver un homme en caleçon dans leur placard, par exemple). D'une certaine manière, A hard day's night est une sorte de précurseur (après Hellzapoppin) de ce « non-sense » cinématographique qui fera la gloire des Monty Python, des Zucker, des Nuls et de beaucoup d'autres.

A savourer sans modération, donc...

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