Coluche, l’histoire d’un mec (2008) d’Antoine de Caunes avec Xavier Demaison, Olivier Gourmet, Léa Drucker, Denis Podalydès

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Contrairement à ce que le titre du film pourrait laisser entendre, il ne s’agit pas d’un biopic retraçant l’histoire de Coluche de ses débuts au music-hall jusqu’à son accident tragique en 1986. Antoine de Caunes choisit de s’intéresser à une très courte partie de la carrière de l’humoriste numéro 1 de l’époque : celle où il décide de se lancer en politique et de se présenter aux élections présidentielles de 1981.

Ce parti pris permet au cinéaste (il s’agit du quatrième long-métrage de l’ex-trublion de Nulle part ailleurs) d’éviter la lourdeur de l’hagiographie et de se concentrer sur un visage moins connu de Coluche (quelque part entre le provocateur des débuts et le saint laïc qu’il finit, hélas, par devenir).

Il n’est pas inintéressant de voir Coluche, l’histoire d’un mec quelques jours après The social Network car l’on peut mesurer l’échec du film de De Caunes à l’aune de la réussite de celui de Fincher. Autant le cinéaste américain parvient à très vite faire oublier qu’il nous dresse le portrait d’une célébrité pour en faire un véritable personnage romanesque, avec ses contradictions et ses doutes ; autant De Caunes se limite vite à une série de chromos sans vie.

Première scène : Coluche est sur scène et joue son fameux sketch (qui, contrairement à ceux de Desproges, a bien mal vieilli) sur la lessive. Premier chromo qui réduit déjà le personnage à ce sketch que tout le monde connaît. J’en profite d’emblée pour dire que, contrairement à la majorité des critiques, je n’ai pas été impressionné par le jeu de Xavier Demaison. Il fait une excellente imitation de Coluche (d’un point de vue mimétique, c’est effectivement assez stupéfiant) mais il ne joue pas un personnage. Encore une fois, je n’ai jamais eu l’impression de voir autre chose qu’une série de vignettes censées caractériser Coluche : le « déconneur », le « fêtard », le révolté et l’humaniste qui pointe le bout de son nez lorsqu’il croise un clochard à la fin du film et que De Caunes nous suggère bien lourdement que notre homme ne va pas abandonner un combat qu’il poursuivra par la suite en fondant des Restos du cœur

Même les petits moments qui laissent entendre que le personnage n’était pas totalement « lisse » (la drogue, son côté « populiste » qui ne lui défend pas de s’entendre avec quelques groupuscules poujadistes…) semblent procéder d’une juxtaposition de vignettes et non de la construction d’un vrai personnage de cinéma. Le côté « chromo » du film est flagrant lorsque le cinéaste montre Coluche à Charlie-Hebdo. Il ne retient de ces moments que de purs clichés : Choron bourré (ça tombe bien, avec son crâne chauve et son col roulé rouge, l’inoubliable « professeur » est immédiatement reconnaissable et donc facilement « imitable »), quelques filles aux seins nus et un joyeux bordel.

Encore une fois, De Caunes se contente de vignettes et cherche uniquement une reconnaissance immédiate (c’est pourquoi on identifie Reiser mais pas Cavanna ou Gébé par exemple).

Finalement, Coluche, l’histoire d’un mec est plus intéressant lorsqu’il se concentre moins sur son « héros » que sur les arrière-cours douteuses de la politique française. De Caunes montre bien comment un simple canular (au départ, il y a un peu de ça) a fait trembler toute la classe politique française (Coluche obtint le soutient d’intellectuels comme Bourdieu et Deleuze et certains sondages le créditèrent de 16% d’intentions de vote !). Le trublion fut également victime d’une certaine censure et certains allèrent jusqu’aux menaces pour le faire taire.

On aurait aimé que le cinéaste détaille un peu plus cette cuisine peu ragoûtante de la politique (Denis Podalydès est très convaincant dans le rôle de cette fripouille d’Attali qui vient trouver Coluche pour l’inviter à se retirer lorsqu’il apprend que Mitterrand a une chance de l’emporter). Mais cela aurait été un autre film.

Il ne reste alors de Coluche, l’histoire d’un mec qu’une succession de vignettes pour dire à quel point l’homme était : 1- rigolo, 2- provocateur, 3- généreux, 4- altruiste, 5- un peu populiste aussi (« un pour tous, tous pourris »), 6- proche des gens, 7- différent des professionnels de la politique.

Mais ça, ne le savait-on pas déjà ?  

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