Cinématon 721-750 (1986) de Gérard Courant

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Franck Dubosc Cinématon n°741

 

Le dispositif Cinématon ne convient pas à toutes les catégories d’individu et même si les portraits ne sont pas forcément « mauvais », on sent une certaine gêne chez les modèles qui ne peuvent pas utiliser leur « outil de travail », à savoir la voix. Les chanteurs, les animateurs de radio et les politiques partent donc souvent avec un handicap, à l’inverse de ceux qui sont habitués à l’image (les peintres, les cinéastes…)

La chanteuse Christiane Redy (n°721) s’en tire en utilisant la béquille classique du carton. Sur l’un d’eux, elle écrit « Moi, je chante », comme un moyen de prouver au spectateur qui ne peut pas l’entendre que c’est par la voix que passe sa véritable « personnalité ».

L’épreuve s'avère beaucoup plus rude pour l’animateur de radio José Artur (n°739) qui semble presque hébété à l’idée de ne rien pouvoir dire pendant plus de trois minutes.

Quant au conseiller général et maire de Laon René Dosière (n°750), il fait comme tous les politiques, il parle dans le vide (c’est d’ailleurs reposant de ne pas l’entendre et son discours mécanique paraît presque moins creux et stéréotypé sans le son !). L’édile a néanmoins une idée astucieuse puisque pendant le portrait, on aperçoit une main qui passe derrière son dos. Pourquoi ? La fin du film permet de réaliser qu’il a placé une clé permettant de le « remonter » comme une horloge. Je ne sais pas s’il a réalisé alors qu’il illustrait de la manière la plus cruelle l’abyssale vacuité d'une parole politique mécanique !

 

Parmi les personnes plus habituées à l’image, deux d’entre elles vont utiliser à nouveau le motif du miroir. La comédienne Gabrielle Lazure (n°747) laisse Courant filmer son reflet qui parfois se dédouble. Est-ce que ce jeu de miroir est un hommage à Robbe-Grillet avec qui elle tourna (le poussif La belle captive) ?

Dominique Laudijois (n°735) procède comme le cinéaste Téo Hernandez et se lance dans un duel de caméra qui donnera lieu à un film « bicéphale » (le Cinématon d’un côté et Cinématé de l’autre). Sauf que l’enseignante et cinéaste s’est, en plus, placée devant un miroir qui permet de voir en reflet Courant filmer. Un beau portrait gigogne.

 

Le reste de l’étape est passée comme un songe, entre visages qu’on n’oublie pas (ce singulier « tireur d’autobus » canadien nommé Le grand Antonio – n°726- et ses airs d’ogre hilare, le cinéaste et comédien Paul Allio –n°738- chez qui on retrouve le regard doux de son père René…) et ceux que l’on oublie (nous ne citerons pas de noms par courtoisie).

Il y a également ceux qui se font projeter leur film sur le visage (Denis Laplante, n°723), ceux qui tentent d’hypnotiser le spectateur en imprimant un mouvement de balancier à une petite balle (Aki Kuroda, n°727) ou ceux encore qui montrent des exemplaires d’une revue de cinéma (Cinématographe) dont ils furent rédacteurs (Antonio Rodrig, n°730)

 

Mais la curiosité de l’étape du jour furent les portraits que Gérard Courant réalisa lors d’une émission de radio à Yerres le 6 avril 1986. Les trois portraits prouvent, comme je le disais en introduction, que les gens de radio ne sont pas très « cinématogéniques ». Ils seraient même plutôt ennuyeux si le comédien invité ce jour-là n’était pas la future star du comique gras et lourd Franck Dubosc (n°741) qui force l’intérêt non pas par son charisme mais par le fait qu’une fois de plus, Courant a filmé avant tout le monde[1] une future vedette qui n’avait alors que 22 ans…  



[1] Il n’avait alors tourné  que dans l’effrayant navet de Michel Lang A nous les garçons.

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