Cinématon 841-855 (1986) de Gérard Courant

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Claude Confortès Cinématon n°854

 

A mesure que j’avance dans ma course folle, je me demande si Cinématon ne va pas finir par tomber sous le coup de la loi Evin. Viendra peut-être un jour où les censeurs (mais attention, ceux qui sont du côté du Bien, qui veillent sur notre alimentation, notre santé, nos états d’âme et qui réglementeront bientôt jusqu’au moindre recoin de nos vies privées) exigeront des retouches numériques pour tous ces portraits où les modèles fument ostensiblement.  

Je n’ai pas fait de statistiques précises mais je ne crois pas me tromper en disant que la cigarette est l’accessoire numéro un des Cinématons (à vue de nez, les lunettes de soleil doivent venir ensuite). Elle est partagée aussi bien par un critique yougoslave (Ranko Munitic, n°841), un cinéaste algérien (Mahmoud Zemmouri, n°843) que par le vétéran de la « croisière jaune » André Reymond (n°855) qui, à 84 ans, tire avec conviction sur un infâme mégot.


Certains se distinguent en adoptant la pipe, à l’image d’Ettore Scola (n°849) qui ne fera rien d’autre que fumer. Le coureur commence tellement à s’habituer à croiser de grands noms qu’il n’est même plus surpris de retrouver dans Cinématon l’auteur d’Affreux, sales et méchants dont le portrait met un terme au séjour de Gérard Courant à Montpellier. Il passe d’ailleurs juste après un cinéaste moins connu à l’époque mais qui s’est imposé depuis : Amos Gitaï (n°848) qui semble aux abois. Est-ce qu’il craint le soleil qui, soudain, surexpose l’image et créé une sorte de halo bleuté autour de son visage en lui donnant un aspect fantomatique ?  

Chez Courant, tout le monde est traité de manière impartiale et sans discrimination. Même si ma phrase risque de paraître bêtement sentimentale, je trouve assez beau de retrouver presque côte à côte un cinéaste israélien (Gitaï) et un cinéaste palestinien (Michel Khleifi, n°844), réunis par les vertus de l’Art.    

 

A part ça, l’année 1986 se termine mollement avec un portrait assez terne du cinéaste Eduardo Di Gregorio (n°853) et un autre du réalisateur de films (on n’ose parler de « cinéaste » !) Claude Confortès (n°854) qui a le malheur d’oublier qu’un Cinématon agit comme un révélateur implacable de la personnalité filmée. Or il pose en montrant visiblement ce qui fut le titre de son premier film : « Le roi des cons » !

Dans son livre Cinématon, Gérard Courant a néanmoins l’élégance de sous-titrer le photogramme de ce portrait d'un généreux « Ne l’accablons pas »...

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