Cinéma(ra)t(h)on : J-87
Cinématon 1891-1921 (1998) de Gérard Courant
Loïc Brébant Cinématon n° 1897
Ayant désormais dépassé les 1900 films, je peux désormais l'affirmer : les séries que j'aime le moins dans Cinématon sont celles que le cinéaste a tournées à la chaîne le temps d'une soirée ou d'un événement quelconque. Il peut, bien entendu, y avoir de très beaux portraits dans le lot mais, généralement, je me lasse assez vite du décor unique, des visages interchangeables qui défilent devant la caméra et des modèles n'ayant pas préparé leurs Cinématons et qui ne font, la plupart du temps, rien.
L'étape du jour nous a malheureusement réservé deux soirées parisiennes sans grande originalité. La première, celle du 5 juin 1998 nous a quand même permis de découvrir les visages du grand Yves Frémion (n°1891), auteur de livres remarquables (sur les « Provos » hollandais ou encore ces séries noires écrites sous le pseudonyme de Colonel Durruti) et celui de l'auteur de BD Mézières (n°1894) qui s'exerce pour l'occasion à la pantomime.
La deuxième soirée aura lieu le 10 juin et se révélera encore plus terne. Assis sur un canapé marron et devant un mur jaune, aucun des modèles filmés ne parviendra réellement à tirer son épingle du jeu même si l'artiste vidéo Sabina Ott (n°1905) tente d'aguicher la caméra avec de nombreux clins d’œil et une bouche simulant des baisers et si l'artiste Johaness Zits (n°1907) ôte son t-shirt et offre des attitudes très maniérées aux spectateurs.
Entre ces deux « séquences », on trouvera néanmoins le Cinématon le plus réussi de l'étape : celui du journaliste Loïc Brébant (n°1897) puisque son portrait a été tourné...sur l'autoroute A 12 ! J'avoue ignorer comment a pu être réalisé ce film. Notre homme se trouve à l'arrière d'un véhicule mais on ne voit pas de pare-brise derrière lui1, juste le flot ininterrompu des automobiles. L'effet produit est très curieux et assez fascinant (on imagine presque une surimpression sauf que le passage sous un tunnel nous prouve la véracité de la scène).
Pas de grosses surprises pour la fin de notre étape mais quelques portraits plaisants. L'écrivain et éditeur Pierre Chalmin (n°1915) se fait filmer de profil et tire sur sa cigarette. Le critique d'art russe Vladimir Perts (n°1918) procède d'une manière déjà-vue (se faire filmer de dos, puis de profil -le droit-, de face pour terminer par le profil gauche) mais avec un bon « timing ». Quant au cinéaste et critique Jean Breschand (n°1919), il reste de marbre et parvient à imposer une stature impressionnante grâce à son abondante chevelure et à la lumière de septembre qui sculpte son visage.
Autre classique de Cinématon : la présentation d'objets à la caméra. Cette fois, c'est l'auteur et dessinateur Yann Rudler (n°1917) qui s'y colle en montrant des figurines de Tintin et diverses bandes dessinées.
Fin 98, Gérard Courant se rend à Bruxelles, probablement parce qu'il y tourne Le journal de Joseph M. Ce séjour débute avec le joli portrait de la jeune Nèle Pigeon (n°1720), fille de la cinéaste Mara Pigeon ; qui, pour l'occasion, essaye toute sorte de chapeaux avec un beau sourire.
Et c'est sur cette note de bonne humeur que se termine notre étape du jour.
1 Dans des cas comme celui-ci, il faut toujours faire confiance à l'intuition féminine puisqu'en posant la question à Estelle, elle a tout de suite deviné qu'il s'agissait de l'arrière d'un car, ce qui paraît évident rétrospectivement (peut-être un camping-car, éventuellement).