Terreur à l'hôpital
Horror hospital (1973) d'Antony Balch avec Michael Gough, Vanessa Shaw (Editions Artus Films). Sortie en DVD le 4 juin 2013
Après avoir réédité de nombreuses pépites du gothique italien, nos amis d'Artus explorent aujourd'hui le cinéma d'épouvante britannique. Personne ignore qu'à partir des années 50 (et surtout en 1957 lorsque Fisher tourne Le cauchemar de Dracula), le studio Hammer redonne un coup de jeune au cinéma gothique anglais en revisitant les grands mythes du fantastique jadis engendrés par la Universal (Dracula, Frankenstein, la momie...).
Même si la Hammer naquit en 1935 et qu'elle poursuit encore aujourd'hui ses activités, on peut affirmer sans trop de risques que son heure de gloire se situe de la fin des années 50 à la fin des années 60. C'est à cette époque que sous la férule des meilleurs cinéastes de la maison (Roy Ward Baker, Freddie Francis, John Gilling et, bien entendu, Terence Fisher), elle revisite les grands mythes fantastiques et qu'elle fédère autour d'elle toute une cinéphilie marginale qui, en France, se regroupera autour de la revue Midi-Minuit Fantastique1.
Antony Balch vient de cette cinéphilie. Alain Petit nous apprend, en supplément de ce DVD, que ce futur cinéaste connaît bien le pape des amateurs de fantastique et d'épouvante : Jean Boullet. Avant d'entreprendre Horror Hospital (qui sera son deuxième et dernier long-métrage), Balch a d'abord exercé la profession de distributeur et il a réalisé des courts-métrages avec le maître de la beat generation : William Burroughs. En 1970, il tourne un Mondo movie intitulé Secrets of sex (tout un programme!) avant de s'atteler à ce film d'horreur conforme à ses goûts de cinéphile.
Horror hospital s'inscrit à la fois dans la grande tradition du cinéma d'épouvante britannique mais témoigne également, reconnaissons-le, d'un certain déclin du genre. Pour le dire en quelques mots, le film est une sorte de relecture du mythe de Frankenstein : aux caves gothiques où Frankenstein se livrait à ses expériences suspectes succèdent un hôpital et des méthodes plus modernes de contrôle de l'esprit. Balch reste néanmoins fidèle au décorum : ledit hôpital se situe dans un vieux château et nous aurons droit aux traditionnels orages et au savant fou démoniaque.
Mais en 1973, les choses ont changé et le cinéaste exacerbe certaines données qui n'étaient jusqu'alors que sous-jacentes : l'érotisme (qui reste cependant très « soft » même si on peut admirer le temps d'un instant la belle Vanessa Shaw sous sa douche) et la violence. Sur les pas de Romero (et bien entendu HG.Lewis), les cinéastes n'hésitent désormais plus à faire gicler le sang. Dans Horror hospital, le docteur Storm (l'excellent Michael Cough) a inventé un ingénieux système de lame sortant de sa voiture et lui permettant de décapiter les fuyards !
Néanmoins, le film souffre de gros défauts de construction (le scénario est assez mal bâti et très peu crédible) et on regrette que Balch n'ose pas jouer à fond la carte de l'outrance et du mauvais goût comme le fera Paul Morrissey avec Chair pour Frankenstein (produit par Warhol) à la même époque.
Le résultat reste cependant relativement plaisant. D'une part pour la patine 70' de l'objet (les habits improbables, les coupes de cheveux...) et, d'autre part, pour quelques silhouettes croquignolettes comme celle du nain majordome obligé d'empiler les gardes qu'il vient d'endormir pour atteindre le loquet d'une porte ou encore celle de ce responsable d'une piteuse agence de voyages (« hairy holidays », soit « des vacances au poil » !) qui lorgne avec envie sur la bosse du pantalon du jeune premier (scène très classe!).
Une curiosité qui donne envie d'aller plus loin dans cette collection « British horror ». On vous en reparle très vite...
1 Je renvoie à la lecture de l'indispensable livre de Nicolas Stanzick Dans les griffes de la Hammer (Editions Le bord de l'eau)