Impossible de couper à la tradition en cette période. Je cède donc une fois de plus au plaisir des listes et vous livre sans plus tarder mon top 10 pour l’année 2007.

 

1er Inland Empire (David Lynch)

 

Malgré les controverses et les débats enfiévrés qui ont suivi la sortie du film, malgré les gourous nazis et les amitiés suspectes avec Nabot 1er de David Lynch ; ce film reste le plus grand choc de l’année et la preuve qu’on peut faire du très, très grand cinéma avec juste une petite caméra vidéo.

 

2ème Ne touchez pas la hache (Jacques Rivette)

 

 Jacques Rivette est sans doute l’un des derniers cinéastes à ne croire qu’à la mise en scène. En jouant sur la théâtralité, les durées et le cadre, il parvient à réaliser une adaptation parfaite de la duchesse de Langeais de Balzac, sans le moindre soupçon d’académisme.

 

3ème Les amours d’Astrée et de Céladon (Eric Rohmer)

 

Le film le plus libre, le plus audacieux, le plus joyeusement intemporel de 2007 par le plus juvénile de nos cinéastes. Quand on songe que le conseil régional de la Loire a porté plainte contre ce film en raison de l’avertissement placé au début du film, on se dit que décidément, notre monde est bien malade et que celui de Rohmer est bien plus réjouissant…

 

4ème Le metteur en scène de mariages (Marco Bellocchio)

 

L’accueil n’a pas été véritablement négatif mais j’ai senti les critiques un peu tiédasses alors que le film de Bellocchio est un très grand film qui dresse un tableau impitoyable de la situation actuelle du cinéma (et par extension, de la situation politique) en Italie. Mise en scène baroque exceptionnelle.

 

5ème Les promesses de l’ombre (David Cronenberg)

 

Au-delà des empoignades épiques qu’a suscitées ce film sur la toile, la puissance d’incarnation de David Cronenberg…

 

6ème L’avocat de la terreur (Barbet Schroeder)

 

Plus qu’un documentaire sur un personnage incroyablement ambigu (Jacques Vergès), un très grand film où le cinéaste renoue avec le thème principal de ses fictions en lui donnant une ampleur considérable : un regard sur le monde par-delà le bien et le mal…

 

7ème I don’t want to sleep alone (Tsai Ming-Liang)

 

Ca ne change pas : les personnages mutiques de Tsai et leurs hautes solitudes me bouleversent toujours autant…

 

8ème La fille coupée en deux (Claude Chabrol)

 

Notre époque vue par l’œil malicieux, tranchant comme un scalpel et sarcastique de Chabrol…


9ème My blueberry nights (Wong Kar-Waï)

 

Puisque personne ne le citera, je réaffirme ici mon goût pour ce grand film maladif et mélancolique.

 

10ème Belle toujours (Manoël de Oliveira)

 

Comment le centenaire Oliveira parvient à dialoguer avec Buñuel  dans un film étonnant et malicieux.

 

En bonus, deux coffrets DVD découverts cette année et qui furent peut-être les deux véritables chocs que m’a réservés 2007 :

 

Œuvres cinématographiques complètes (Guy Debord)

 

Parce qu’au-delà du cinéma, ces films sont l’expression d’une des pensées les plus fructueuses et les plus riches du 20ème siècle. Nous allons avoir droit cette année à la commémoration de 68 (40 ans déjà !) et j’imagine déjà le défilé de mornes tronches, anciens combattants devenus patrons de presse ou bien installés dans la société, venir jouer les donneurs de leçons et regretter le bon vieux temps tout en faisant tout pour empêcher ce temps des cerises de revenir. Ne pas manquer de lancer de gros glaviots à ces traîtres et se replonger dare-dare dans la pensée situationniste, quintessence de ce qu’aurait pu être le joli mois de mai. Et même si leurs chemins se sont séparés, profitons de ce moment pour souhaiter une longue vie et une excellente année à Raoul Vaneigem, René Viénet et Jean-Pierre Voyer.

 

Berlin Alexanderplatz (Rainer Werner Fassbinder)

 

Un film somme hallucinant où Fassbinder parvient tout simplement à adapter totalement un livre. Près de 15 heures d’émotions sublimement mises en scène. Je recommande ce chef-d’œuvre à tous ceux qui se pâment devant les plates séries télé actuelles…

 


 


***

 

Sur ces quelques considérations, je vous laisse chers lecteurs. J’ignore ce que nous réserve 2008 mais j’ai le pressentiment que tout ne sera pas rose. Mais malgré la remise au goût du jour de l’esclavage (bye, bye, 35 heures, mais malheureusement pas pour les 10 heures hebdomadaire !), la recrudescence des vols de sacs à main, les grévistes que l’on va considérer comme des preneurs d’otages, les traités constitutionnels européens imposés sans vaseline (ce n’est pas de la prise en otage, ça ?) malgré le suffrage universel, les grotesques élections municipales, le prochain Astérix,  Brel profané par l’abject Pagny, la presse couchée et les médias rampants, l’arrogance crasseuse du beauf décomplexé qui n’hésite plus à s’afficher ; je vous souhaite à tous une excellente année, notamment à mon boss Laurent D. , à mes voisins blogueurs que je lie et lis avec passion chaque jour, à mes fidèles lecteurs depuis mes débuts sur 20six, aux commentateurs réguliers dont les remarques sont toujours stimulantes et à tous ceux qui me lisent régulièrement ou pas, qui se manifestent ou pas.

 

« Ma vie n’est pas quelque chose que l’on doive mesurer. Ni le saut du cabri ni le lever du soleil sont des performances, mais quelque chose qui grandit et cherche à atteindre la perfection. Et ce qui est parfait n’accomplit pas de performance : ce qui est parfait œuvre en état de repos. Il est absurde de prétendre que la mer soit faite pour porter des armadas et des dauphins. Certes, elle le fait -mais en conservant sa liberté. Il est également absurde de prétendre que l’homme soit fait pour autre chose que pour vivre. Certes, il approvisionne des machines et il écrit des livres, mais il pourrait tout aussi bien faire autre chose. L’important est qu’il fasse ce qu’il fait en toute liberté et en pleine conscience de ce que, comme tout autre détail de la création, il est une fin en soi. »

 

Stig Dagerman (Notre besoin de consolation est impossible à rassasier)

 

 

 

 

 


 


 

 

 

 

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