Howard the duck (1986) de Willard Huyck avec Lea Thompson, Tim Robbin. (Éditions Elephant films). Disponible en DVD depuis le 15 avril 2015

Le canard déchaîné

Howard the duck est entré dans la légende pour plusieurs raisons. D'abord, si l'on excepte quelques téléfilms et serials, il s'agit de la toute première adaptation cinématographique d'un comic Marvel.

Ensuite, le film fut un immense flop public et critique à sa sortie, décrochant au passage de nombreuses distinctions aux Razzie Awards (entre autres, celles du pire film et du pire scénario pour l'année 86). Il concourra même au titre du pire film de la décennie à cette même cérémonie en 1989 !

Enfin, il est quand même intéressant de souligner que ce film n'a rien d'une petite série B ou Z souffreteuse mais qu'il a été produit par George Lucas, que John Barry en a signé la musique et que le réalisateur a pu bénéficier des effets-spéciaux d'ILM.

 

Revu trente ans après, le film ne mérite sans doute pas une réhabilitation totale mais force est de constater qu'il s'agit d'un objet curieux et non dénué d'intérêt.

 

Howard le canard vit tranquillement sur sa planète lorsqu'un beau jour, il se trouve « aspiré » et projeté sur terre. Très vite, il fait la connaissance de Beverly, une chanteuse de rock...

 

La première chose qui frappe en découvrant ce film, c'est de constater que Marvel ne signifie pas obligatoirement infantilisme et personnages asexués. Howard n'a rien du « super-héros » classique : il boit de la bière et admire la playmate des pages centrales de Playduck ! Willard Huyck poussera même l’ambiguïté jusqu'à placer son canard dans le même lit que Lea Thompson (la chaste héroïne de Retour vers le futur!) en suggérant que la belle ne le laisse pas indifférent.

Réaliser que Lucas ait pu produire un film zoophile ne manque pas de piquant !

De la même manière, Howard fait preuve d'un esprit assez mordant et cynique qui nous console de toutes les sucreries dégoulinantes de mièvrerie qu'on a pu voir lorsqu'il s'agit de confronter des créatures extra-terrestres aux hommes (je songe en particulier à E.T dont Howard the duck pourrait être une version « adulte »). Certaines de ses répliques sont assez drôles (notamment lorsqu'il est confronté à un juvénile Tim Robbins) et, encore une fois, ça fait plaisir de voir que dans cet ancêtre des blockbusters décérébrés d'aujourd'hui, on n'élude ni le sexe, ni une certaine violence.

 

Bien sûr, cet univers du rock des années 80 paraît bien vieillot et la musique synthétique qui envahit parfois le film est tout simplement hideuse mais il est quand même rare de voir un produit estampillé « Marvel » qui ne s'adresse pas forcément au moins de 12 ans !

 

Faut-il y voir la patte de Willard Huyck, cinéaste curieux, auteur d'un très beau film fantastique (Messiah of evil) et qui ne dirigera plus aucun film après Howard the duck ? Toujours est-il que le résultat n'est quand même pas totalement réussi et qu'on peut diviser l’œuvre en deux parties.

 

La première est la plus séduisante : l'exposition, la description de ce canard à mille lieues de tous les super-héros, l'humour un peu absurde des situations et des dialogues, les allusions salaces et parodiques (un poster « canard » des Aventuriers de l'arche perdue).

Ensuite, notre créature va devoir aider ses amis à lutter contre une invasion programmée des « souverains noirs ». On voit alors se dessiner ce qui m'insupporte aujourd'hui dans les blockbusters : une surenchère d'effets-spéciaux et une démonstration de force pyrotechnique au détriment de la mise en scène, du récit et des personnages (la petite rockeuse n'a désormais plus d'autre fonction que d'être ligotée et de crier).

 

Plutôt enlevé dans sa première partie, le film s'embourbe ensuite dans des scènes d'action de plus en plus ennuyeuses et il aurait sans doute beaucoup gagné à durer vingt minutes de moins.

 

Ces réserves posée, Howard the duck reste un objet curieux qui mérite le coup d’œil des cinéphiles déviants, ne serait-ce parce qu'il ose injecter une bonne dose d'absurde (qui vient de la BD, je crois, mais je ne suis vraiment pas spécialiste) dans l'univers stéréotypé et infantile des Marvel...

 

 

 

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