Tripes à l'italienne

Horrible (1981) de Joe d'Amato avec George Eastman, Annie Bell, Katya Berger

Tripes à l'italienne

En 1981, Joe d'Amato a déjà une considérable carrière derrière lui et a tâté à peu près à tous les genres : le western, le péplum, la comédie sexy, le film de guerre, le polar... Mais les deux genres qu'il affectionne le plus (et qu'il mêle parfois) sont l'érotisme (on ne présente plus la longue saga Black Emanuelle) et l'horreur. Comme les bouchers charcutiers du cinéma « bis » italien de l'époque (Lenzi et Deodato), d'Amato a déjà payé son tribut au « gore » et au film de cannibales.

Avec Horrible, il retrouve George Eastman, son acteur fétiche, qu'il avait déjà fait tourner dans Porno holocaust et le mythique Anthropophagous. Le film débute d'ailleurs comme se terminait ce dernier : George Eastman escalade une grille et s'empale sur ses pointes. Lorsqu'il sonne à la porte de la famille terrorisée, ses tripes sortent de son ventre et se répandent dans ses mains !

Même si ces retrouvailles semblent annoncer de belles réjouissances, il s'avère qu'Horrible n'est pas si atroce que ça (à tous les sens du terme) : d'un point de vue cinématographique, il se laisse regarder en dépit de ses défauts et au niveau horreur, le cinéaste semble avoir mis la pédale douce sur les épanchements d'hémoglobine même si certains passages restent marquants.

Joe d'Amato, comme de nombreux confrères transalpins, s'est toujours plu à démarquer les grands succès américains. Cette fois, c'est sur les traces de Carpenter et de son Halloween qu'il marche en faisant de son héros un évadé d’hôpital qui va semer la terreur dans les environs. A la dimension « psycho killer » s'ajoute un élément fantastique puisque cet homme (George Eastman, donc) a la capacité de régénérer ses propres cellules, ce qui fait de lui un être quasiment immortel. Parmi les autres références du film, on citera également Shining lorsque le tueur fou (qui a des faux airs de Charles Manson) détruit une porte et cherche à s'introduire dans la pièce où la petite héroïne s'est réfugiée.

Puisque nous sommes face à un film d'horreur, il convient de souligner immédiatement que le film comporte un certain nombre de scènes qui réjouiront les amateurs : une perceuse qui traverse un crâne, un meurtre à la scie à ruban, un compas planté dans les yeux, une décapitation ou encore la fameuse scène du four qui voit notre tueur maintenir de force la tête d'une malheureuse baby-sitter (Annie Belle) dans ledit four.

Le scénario, d'une simplicité à toute épreuve, se divise en deux parties : l'évasion du tueur puis la manière dont il s'introduit chez une famille ordinaire où vivent deux enfants (dont une adolescente clouée au lit). Cette trame minimaliste ne sert plus qu'à une chose : amener de manière régulière les scènes gore qui pimentent le récit. Le film souffre sans doute de ce caractère un peu mécanique, de cette manière d'introduire les scènes choc comme dans un film porno où toutes les dix minutes le spectateur doit pouvoir se repaître des figures imposées.

De plus, si d'Amato laisse de côté son exubérance latine pour viser à une efficacité « à l'américaine », il faut bien reconnaître que ce n'est pas non plus un grand génie de la mise en scène : la conduite du récit est un peu poussive et le rythme aurait mérité d'être plus soutenu.

Pourtant, en dépit de toutes ces réserves, le film n'est pas sans charme. Celui, sans doute, d'une époque où les cinéastes italiens n'avaient pas froid aux yeux et ne reculaient devant aucune outrance, aucune limite. Et c'est avec tous ses défauts qu' Horrible témoigne, à sa manière, de cette époque hélas révolue...

Retour à l'accueil