Savage weekend (1976) de David Paulsen avec Christopher Allport, Jim Doerr, David Gale, Marilyn Hamlin, Caitlin O'Heaney. (Éditions Artus Films) Sortie en DVD le 6 septembre 2016

Un dimanche à la campagne

Sans être une grande réussite, Savage weekend est un film d’horreur assez atypique qui mérite le détour pour plusieurs raisons. Dans un des suppléments du DVD, Éric Peretti dresse un rapide panorama de la carrière étonnante de David Paulsen qui débuta d’abord dans la musique et dans la chanson, travailla pour le mythique duo de producteurs Menahem Gohan et Yoram Globus, réalisa deux longs-métrages d’horreur (Savage weekend est le premier) avant de se consacrer exclusivement à la télévision et d’être homme à tout faire (scénariste, réalisateur…) sur les trois soap-opéras les plus célèbres des années 80 : Dallas, Côte Ouest et Dynastie !

Avant cela, Paulsen a donc signé ce Savage weekend assez étrange dont il convient d’emblée de souligner les défauts. Primo, un scénario assez bancal qui met en scène une bande d’adultes qui décide de passer un week-end à la campagne afin de terminer un bateau. La construction narrative est assez bizarre dans la mesure où il ne se passe quasiment rien pendant la première heure si ce n’est une sorte de chronique psychologique où l’auteur cherche à caractériser ses personnages : une femme divorcée et récemment remariée mais toujours hantée par son passé, sa petite sœur, un tombeur volage et un homosexuel à qui l’on offre une séquence dans un bar et dont le spectateur ignore toujours l’intérêt (qu’il soit dramaturgique  ou psychologique)… La mise en scène est également assez aléatoire, avec beaucoup de raccords foireux et des perches qui apparaissent à l’image. Enfin, la dernière partie est la plus directement horrifique avec un tueur masqué qui vient faire le ménage chez ces new-yorkais en goguette…

Pour être tout à fait honnête, on a parfois un peu l’impression d’assister à la parodie de film d’horreur imaginée autrefois par les Nuls au début de La Cité de la peur. Et ce ne sont pas les quelques nudités et scènes gentiment « choc » (un meurtre avec une aiguille enfoncée dans une oreille) qui parviennent à tirer le spectateur de sa torpeur.

Et pourtant, malgré tous ces défauts, Savage weekend n’est pas totalement négligeable en ce sens qu’il apparaît comme un film de « transition ». D’un côté, il s’inscrit dans la vague des films de terreur américains des années 70 et de leur esthétique fruste. Cette plongée chez les « rednecks » dégénérés et meurtriers évoque aussi bien le Délivrance de Boorman (la musique du générique au banjo est assez évocatrice) que La Dernière maison sur la gauche ou, bien entendu, le Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper (notamment parce que cet ustensile est, là aussi, utilisé comme une arme). Petite curiosité pour les amateurs de fantastique : l’acteur qui incarne l’un de ces ploucs (le bûcheron qui fait fantasmer la citadine) n’est autre que David Gale, le futur Docteur Hill dans Ré-animator.  On appréciera aussi la tension érotique et le goût du sous-entendu salace dont fait preuve le réalisateur. Lorsqu’elle voit ledit bûcheron, l’héroïne lui demande à brûle-pourpoint s’il a des œufs ! Et un peu plus tard, elle tâtera non sans une certaine envie le pis d’une vache tandis que l’homme lui montrera la technique pour recueillir le lait. Cette atmosphère moite finit par séduire un peu le spectateur le plus indulgent.

Sur un autre versant, Savage weekend annonce toute la vague des slashers qui naîtra en 1978 avec le triomphe d’Halloween de Carpenter puis la saga des Vendredi 13.  Le film de Paulsen, même s’il ne met pas en scène des adolescents, partage avec ces œuvres cette idée du tueur masqué. Et même si le puritanisme des années 80 n’est pas encore à l’œuvre, il y a quand même dans l’œuvre l’idée que ce tueur punit aussi les frasques sexuelles des protagonistes.

Du coup, Savage weekend fait office de précurseur d’autant plus qu’il connut une sortie décalée. Réalisé en 1976, il ne sortit sur les écrans qu’en 1979 sous la férule de la Cannon de Goham et Globus.

Pour son climat moite, ses sous-entendus sexuels et ce tueur masqué qui en annonce de bien plus célèbres, il mérite – en dépit de tous ses défauts et ses maladresses- un petit coup d’œil…

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