Belles d’un soir (alias Jouissances) (1977) de Frédéric Lansac (alias Claude Mulot) avec Brigitte Lahaie (ouais ! Ouais !), Martine Grimaud, Alban Ceray

 

 

 

Nous sommes d’accord : le cinéma porno, tout du moins dans 99% des cas, c’est nul ! Le degré zéro du cinéma et la négation même de toute beauté, de tout désir. Les films X ne sont que de sales pubs ventant les mérites techniques de corps-machines en parfait état de marche (avec démonstration de bon fonctionnement à l’appui).

Pourtant, imaginez-vous dans la bibliothèque somptueuse de vos grands-parents. Vous fouillez un peu et derrière un rideau de Georges Duhamel ou de Romain Rolland, vous tombez soudain sur un petit ouvrage illustré anonyme et licencieux. N’y jetteriez-vous pas un œil ? Et bien le cinéma porno des années 70 me procure cette délicieuse sensation là, celle de découvrir des trésors enfouis par les années et d’accéder aux secrets d’images coquines antédiluviennes.

Sauf qu’ici, en raison de la détestable politique de Cinéauteur qui propose des versions expurgées de ce genre de films pour pouvoir les diffuser en prime-time, nous avons eu l’impression d’avoir feuilleté un ouvrage où manquaient toutes les illustrations les plus salaces, réduisant de ce fait une œuvre de 90 minutes à 75 ! (Bravo pour l’intégrité des œuvres et pour le respect du travail de montage effectué à l’époque par Gérard Kikoïne !).

 

 

 

Bref, sous le titre de Belles d’un soir se cache en fait une version « soft » du plus direct Jouissances, exploité également en province (où l’on ne fait rien à moitié, croyez-en un robuste étalon bourguignon élevé en plein-air !) sous le titre de Suprêmes jouissances (Ben voyons !). Par ailleurs, le film est signé d’une vieille connaissance (Claude Mulot, sous son habituel pseudo de pornocrate Frédéric Lansac) et il a obtenu, nous apprend la très érudite Saison cinématographique de 1977, le « phallus d’or » au festival de Copenhague (c’est dingue le nombre d’informations primordiales dont l’existence nous passe au-dessus de la tête!).

Las ! L’amateur devra se passer de phallus (franchement, ce n’est pas le sacrifice qui m’a coûté le plus d’efforts !) et verser une petite larme nostalgique sur ces « scènes pornos bien intégrées » (dixit La saison) puisque ici, elles sont totalement désintégrées (coïtus interruptus)  et expédiées en moins de temps qu’il n’en faut à l’éjaculateur précoce pour venir à bout de Monica Bellucci !

 

 

 

Vous tenez vraiment à savoir de quoi parle ce film ? Allons-y et tentons de justifier un minimum cette note. Trois demoiselles d’aujourd’hui se révoltent contre leur condition de femmes soumises (elles sont lasses d’être mariées à des beaufs qui jouent au poker toute la nuit et leur réclame à manger en rentrant au petit matin). Elles décident de s’émanciper en louant un appartement et en se conduisant comme leurs maris : attitude de soudards avec l’agent immobilier (« où est-ce qu’on se lave le cul ? » demande élégamment l’une d’entre-elles), soirées entre copines, embauche d’un « homme de ménage », recherche d’aventures rapides…D’une certaine manière, ces trois délicieuses gredines appliquent à la lettre les conseils féministes donnés par Katharine Hepburn dans Madame porte la culotte (à ceci près qu’elles ne portent que rarement cet ustensile suranné, aussi inutile que disgracieux à l’œil de l’esthète).

Bon, je n’irai pas aussi loin que la notule de la Saison qui parle d’un « cri de révolte sympathique qui vise l’aliénation, la bêtise d’un monde artificiel et mensonger et qui soutient une lutte des opprimés » (pour un peu, le film ne serait rien d’autre que le programme électoral d’Arlette Laguillier !). Mais il est vrai que ce porno hongre (ça ne veut rien dire mais l’image est assez parlante, ne trouvez-vous pas ?) est assez amusant (Lansac chargeant la mule à fond lorsqu’il s’agit de fustiger le phallocratisme ambiant) et n’est pas trop mal tourné (très beau plan lorsque Brigitte Lahaie se fait prendre par derrière, la tête dans le frigidaire. Elle est filmée depuis l’intérieur du frigo et le cinéaste prend bien soin de laisser la bouteille de bière que son beauf de mari finira fatalement par lui réclamer au premier plan. C’est assez rigolo !). Même si on ne peut juger le montage qui est devenu charcutage, le cadre et la lumière ne sont pas trop mal. Par contre, l’interprétation est des plus calamiteuses qui soit ! Heureusement que les actrices ont des arguments d’un autre ordre qui nous empêchent de nous concentrer trop longtemps sur les lignes de dialogues qu’elles récitent péniblement ; sinon, ça serait insupportable !

Vous vous demandez certainement bien pourquoi je suis encore là à vous parler d’un monument de ringardise rigolboche et bien je vais vous avouer une chose : moi aussi ! Mais après tout, c’est les vacances et une envie de légèreté qui l’a emporté…

 

 

 

 

 

 

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