L’âme sœur (1999) de et avec Jean-Marie Bigard et André Pousse

 

Le meilleur moyen de servir la soupe aux anti-darwinistes, c’est de jeter un œil sur l’évolution de la comédie en France et de constater que la sélection naturelle ne conduit pas, loin s’en faut,  à l’amélioration de l’espèce. Car la comédie française, ce fut quand même Molière, Marivaux, Labiche, Feydeau, Allais, Cami, Guitry, Tati, Desproges… Et voilà qu’au bout de la chaîne, nous nous retrouvons avec Djamel Grosse Bouse, Eric et Ramzy et… Bigard ! Ah, Bigard ! En quelques années, l’ « humoriste » (je mets des guillemets car le terme ne désigne plus aujourd’hui des gens drôles mais une profession grassement rémunérée et sponsorisée par les chaînes de télévision !) est devenu un symbole national au même titre que le camembert, le salon de l’auto, le pinard (plutôt gros rouge que Chassagne-Montrachet, mais bon…) ou le rugby ! Mes lecteurs réguliers auront peut-être été étonnés que je n’aie pas passé mes nerfs sur ce sport alors je les rassure : c’est pour ce soir ! Je ne tiens pas ici à blesser les sincères amateurs du ballon ovale et ne m’en prendrai donc pas à la disgrâce ontologique de ce sport de brutes épaisses (quelle type de jouissance peut tirer l’esthète de la vision de ces mâles suants empaquetés par douzaine et se tirant le short ?) mais à la manière dont cette grotesque coupe du monde a été montée en épingle par d’infâmes publicitaires, sommant la population de s’intéresser soudainement aux exploits d’une équipe nationale dont tout le monde se fout (si elle pouvait perdre le plus rapidement possible, ça ferait perdre des sous à TF1 !) et proposant à ces dames de se pâmer devant des athlètes transformés en mannequins pour des calendriers dont la vulgarité ferait frémir de jalousie la toujours très classe Mathilde Seigner !

Vous allez vous demander pourquoi je me perds dans de stériles digressions sur le rugby à propos de l’âme sœur et bien je vais vous le dire tout de suite : ce film relève de la même propagande publicitaire. Ce n’est d’ailleurs pas un film mais un coup : TF1 a constaté que Bigard pouvait remplir des stades (je n’arrive pas à m’expliquer comment on peut payer 80 euros –au bas mot- pour aller écouter un type raconter des blagues de fin de banquet de mariage en le regardant sur un écran géant !) alors la chaîne lui a offert un film. Pour ne pas oublier qui est le producteur de l’affaire, on aura droit à de nombreux extraits du journal de PPDA et des scènes où les journalistes montrent bien leurs micros TF1 !

Le reste n’a ensuite aucune importance : ça vous intéresse vraiment de savoir que le brave Bigard et son âme sœur sont punis dans une vie antérieure et se voit condamner à naître aux antipodes l’un de l’autre ? Et qu’ils vont se rencontrer ensuite alors qu’il est croque-mort et qu’elle est chanteuse ? Est-il même utile de préciser que le film n’est jamais drôle (seul André Pousse en cardinal mafieux m’a arraché un sourire mais c’est juste à cause de sa tête), que l’humour de Bigard vole au ras des pâquerettes, que le jeu des comédiens est exécrable et qu’il n’y a, évidemment, aucune idée de cinéma dans cette succession de scènes filmées à la diable et montées à la truelle.

L’âme sœur est un navet absolu mais même pas un navet sympathique comme peuvent l’être certaines séries Z improbables ou les kitscheries de Pécas et consorts. L’âme sœur n’est rien mais c’est comme la publicité : ça ne sert à rien de critiquer puisque tout le monde sait (que c’est moche et dégueulasse) mais tout le monde marche…

En attendant de découvrir T’aime de Patrick Sébastien, l’âme sœur accède au panthéon de ces nullités friquées qui, à l’instar du Jour et la nuit de BHL, font frémir mais que tout un chacun se doit d’avoir vu pour comprendre un certain état du cinéma et de notre époque…

 

NB : COPINAGE.

J'ai reçu un mail groupé de l'ami Nicolas qui annonce la sortie imminente de son album/carnet de voyage. Comme j'ai perdu tout mon carnet d'adresse mail avec mes problèmes d'ordinateur, je passe par le blog pour toucher plus de monde. Sincèrement, je n'ai pas encore lu ce bouquin mais les premières images font saliver. Et connaissant l'humour du bonhomme (c'est autre chose que Bigard!), je ne peux que recommander chaleureusement d'aller jeter un oeil ...

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