Women in revolt (1971) de Paul Morrissey avec Candy Darling



Lorsqu'on songe au cinéma underground dont Morrissey fut l'un des hérauts (du moins, c'est la réputation que certains lui ont faite après la fameuse trilogie -Flesh, Trash, Heat- produite par Warhol), on imagine des œuvres hors normes, faisant la part belle à la rébellion.

Or à mesure que je découvre ses films, c'est son côté « conformiste », presque moralisateur qui me saute aux yeux. Il est vrai qu'il ne s'intéresse qu'aux milieux marginaux et à des personnages en décalage total par rapport à la société, mais c'est souvent pour en livrer une vision extrêmement caricaturale et outrée.

D'une certaine manière, cette outrance est plus agréable dans ses tentatives de relecture du cinéma de genre (j'ai un bon souvenir des complètement disjonctés Du sang pour Dracula et Chair pour Frankenstein) que dans ses films hyperréalistes, y compris la trilogie (que je trouve néanmoins intéressante).

Avec Women in revolt, le cinéaste poursuit son étude de personnages asociaux mais franchit un cran dans l'outrance caricaturale. Au niveau du style, nous restons proche de ce « cinéma vérité » au ras du quotidien qui faisait l'intérêt de la trilogie. Sauf qu'ici, le côté rudimentaire et « amateur » lasse un peu et se révèle moins fort car encore un peu plus dispersé (il n'y a plus le « fil conducteur » d'Alessandro). L'image est souvent assez laide et le film est monté à la va-comme-je-te-pousse.

L'absence de style devient vraiment gênante lorsqu'elle se double d'un inintérêt total pour les personnages qui s'agitent devant la caméra. D'Alessandro était un véritable « corps » de cinéma et son personnage forçait l'intérêt. Ici, Morrissey se contente de filmer quelques caricatures de femmes revendiquant agressivement leurs droits et leur émancipation.

Il est évident que le cinéaste se moque délibérément des clichés féministes alors très en vogue à l'époque. Il inverse totalement les rapports de force (ce sont les hommes qui passent leur temps à poil -misère !- et les femmes qui ne cessent de les houspiller et d'en user comme des objets) et gonfle les discours féministes de façon tellement grotesque qu'on a le sentiment d'entendre pendant 1h 30 un condensé de toutes les inepties d'une Isabelle Alonso !

D'autre part, l'aspect satirique vient du fait que ces « revendicatrices » sont, pour la plupart, des travestis. Le discours est ridiculisé et rendu pitoyable dès qu'ils sortent de la bouche de ces épaves pathétiques (ce n'est pas un jugement de valeur que je prononce : c'est la vision qu'en donne le film).

Vous connaissez mon peu de goût pour le féminisme agressif et pourtant, je n'ai pas pu m'empêcher d'être gêné par le mépris qu'affiche Morrissey pour ces femmes et leurs luttes (dont certaines furent fort légitimes). Ainsi, il faut voir Candy Darling, une blonde « à la Kim Novak » faire valoir ses droits pendant une audition (elle souhaite faire du cinéma) et revenir peu à peu sur ses principes par arrivisme et se laisser faire par le producteur libidineux.

Au bout du compte, je n'arrive pas bien à comprendre le sens de Women in revolt : caricature ? Farce ? Satire de mœurs (ou comment les femmes arrivent, en « s'émancipant », à devenir aussi grossières et violentes que les hommes) ?

Peut-être les trois à la fois mais nous retiendrons seulement que le résultat s'avère fort médiocre...

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