Massacre à la tronçonneuse (2003) de Marcus Nispel avec Jessica Biel

 

 

Nous devisions hier d’un grand classique de la science-fiction qui donna lieu à de nombreuses suites et à un remake (c’est vrai, je n’ai pas dit un mot de la version Tim Burton de La planète des singes, pour qui j’ai une petite tendresse coupable même si je reconnais que ce n’est pas une grande réussite du cinéaste.). Hasard de la programmation, c’est aujourd’hui d’un autre grand classique (du cinéma d’horreur, cette fois) ayant connu des suites et des « remake » auquel je vais consacrer une note. Mais cette fois, il n’est nullement question de l’œuvre originelle (malheureusement) mais de la version 2003.

Avant d’y venir, refaisons une fois de plus le point sur le film de Tobe Hooper. Même si ça va finir par se savoir (tout le monde le répète désormais), je propose que tout un chacun se moque sans ménagement, voire crache au visage, de quiconque persistera à prétendre que Massacre à la tronçonneuse est un précurseur du cinéma gore. Non seulement le cinéma sanguinolent est né une dizaine d’années auparavant (avec HG. Lewis) mais il n’y a pas une goutte de sang (ou très peu) dans le film de Tobe Hooper. Si celui-ci reste un chef-d’œuvre aujourd’hui, c’est par sa facture quasi-documentaire, son filmage volontairement pauvre qui rend encore plus saisissante l’atmosphère glauque et malsaine du récit. Massacre à la tronçonneuse, l’original, s’inscrit dans ce courant nihiliste d’un certain cinéma de genre américain au tournant des années 60/70 (La nuit des morts-vivants de Romero, La colline à des yeux de Wes Craven voire même le grand Assaut de Carpenter) qui offrait soudain une vision noire et violente de l’Amérique profonde.

 

 

On se rend vite compte qu’il ne reste absolument rien de tout cela dans ce remake. Nispel situe son film dans les années 70 (c’est à cette époque qu’eut lieu le fait divers qui donna naissance à cette saga) mais se contente, niveau reconstitution, d’un vieux van pourri et de quelques mégots de pétards. Sinon, tout le reste empeste l’époque actuelle, du look de pédales pour magazines féminins des gars aux tenues des nanas (jeans taille basse et t-shirt trop court pour dévoiler le nombril) sans parler des discours moralisateurs qui sont tenus dans l’habitacle du van : l’auto-stoppeuse qui embrasse goulûment le passager qu’elle ne connaît que depuis quelques heures est largement considérée comme une pute et celle qui va devenir l’héroïne du film condamne l’usage que font ses petits camarades de la marijuana. Bref, c’est la vision « Forrest Gump » des années 70 ! (Haro sur les débauchés, aspergeons-les d’eau bénite et élevons les crucifix !). Ceci  dit, nous ne sommes pas venus là pour voir une reconstitution fidèle de ces belles années-là. Le problème, c’est que la mise en scène suinte aussi tous les tics de l’époque actuelle. Filtres orangés jusqu’à la nausée, facture publicitaire et images léchées (ah ! Cette brume qui envahit tous les plans et qui donne l’impression d’un brouillard constant, même dans les plans d’intérieur) : le film évoque la plus banale des séries américaines que diffuse TF1 le dimanche après-midi. C’est tout bonnement atroce.

 

 

Lorsque les choses commencent à se corser (c’est à dire lorsque Leatherface et sa famille rentrent en scène), nous avons le petit espoir que le film va enfin décoller. La description sordide de la maison familiale réussit à nouer les tripes et nous espérons enfin qu’une atmosphère étouffante va advenir. Las ! Les plans répugnants de bidoche ou de la cave immonde de Leatherface sont toujours esthétisés et ça reste de la pub. De la pub trash mais de la pub quand même (peut-être doit-on mettre cette esthétique toc sur le compte du producteur Michael Bay, l’effroyable réalisateur d’Armageddon et de Pearl Harbor , sans doute l’un des cinéastes les plus épais au monde !)  

 

 

Du coup, l’horreur qui s’avère ici beaucoup plus prégnante que dans le film original est comme aseptisée et beaucoup moins traumatisante que chez Hooper. J’ai le souvenir du ronron obsédant de la tronçonneuse qu’on entendait sans discontinuité chez Hooper le temps de longues séquences. C’était terrifiant. Ici, les scènes de poursuites sont sur-découpées, la musique recouvre le bruit de la tronçonneuse et l’instrument fait beaucoup d’étincelles en découpant le métal. C’est ridicule et on se fiche vite royalement de ces cinq crétins qui se font charcuter l’un après l’autre. Je n’irai pas jusqu’à dire que les ados d’Hooper existaient plus mais ce dernier avait le mérite de s’intéresser aux membres de la famille givrée. Cela nous valait une scène de repas familial assez hallucinante (avec le vieux donnant de petits coups de marteaux sur la tête de la jeune fille prisonnière). Dans cette version 2003, les cinglés sont aussi insipides que les victimes et ils indiffèrent totalement.

 

 

Mal construit (à moins d’une perte momentanée d’attention, c’est fort possible, nous n’avons aucune indication sur le sort du jeune homme à lunettes qui se fait casser les dents par le shérif), mal mis en scène, cette nouvelle version de Massacre à la tronçonneuse ne présente pas le moindre intérêt…

 

 

 

 

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