Les premiers outrages (1955) de Jean Gourguet avec Françoise Vatel, Rellys

 

Me voilà rendu dans mes nouveaux pénates après quelques hésitations quant au choix final de mon installation. Si les lieux sont différents, l’énergumène reste le même et risque de faire fuir les rares curieux qui passeraient par ici en leur imposant, dès le départ, une note sur un nanar français fossilisé depuis 50 ans ! 

Jean Gourguet , cinéaste totalement oublié aujourd’hui, fut un spécialiste du mélodrame « sexy », peuplé de filles perdues, de prostituées sentimentales et d’adolescents naïfs trompés.

Dans les premiers outrages (tout un programme !), quatre sœurettes  s’en vont passer leurs vacances d’été à la campagne (dans l’Yonne pour être plus précis). Bichette, l’héroïne du film , est amoureuse de Christian (Kiki) ; un jeune homme qui vient de rater son bac et que son père oblige à prendre des cours particuliers chez un professeur d’université parisien. C’est là que le béjaune, délaissant Bichette, tombe amoureux de la jeune cousine (une « vieille » d’au moins 30 ans comme dit l’une des filles !) du professeur. C’est le sac de nœuds…

 

 

Ce film fleure bon la naphtaline et la France d’antan avec ses grands-mères acariâtres tyrannisant de braves petites boniches, avec ses petits artisans râleurs mais dignes (le père de Kiki) , et son terroir si pittoresque (le bon accent bourguignon de la mère de Kiki et ses roulements de R intempestifs). Gourguet exalte le bon sens populaire, fait l’apologie de l’artisanat contre les longues études inutiles et conforte les distinctions de classes. Tout cela sent le ranci , le néo-pétainisme le plus moralisateur (celui là même qui revient à grand pas en ce moment : prenons garde !).  

Cette sénilité idéologique se double d’une sénilité esthétique puisque le film est totalement indigent. C’est, une fois de plus, de l’artisanat antédiluvien où les séquences nocturnes se déroulent sous des lumières identiques à celles utilisées pour le plein-jour ; où les acteurs récitent un texte épouvantable (« vous êtes un chameau !» sera l’insulte la plus osée entendue dans le film)  et le jouent à la manière d’un spectacle de patronage.

 

 

Pourtant, si nous persistons à vouloir découvrir l’œuvre de Gourguet au-delà de l’aura kitsch qu’elle présente désormais ; c’est pour son extrême « perversité ». Il est bien entendu que la censure de l’époque ne lui permettait pas d’aller bien loin et c’est pour cette raison que les cinéphiles déviants (j’assume) prennent un certain plaisir à voir comment le cinéaste s’y prend pour suggérer ce qu’il ne peut montrer. On voit le bougre prendre un certain plaisir à filmer ses donzelles en maillot de bain ou en dessous « sexy » (hum ! tout est relatif) nous offrant même le plaisir d’entrapercevoir fugitivement à cette occasion un bout de téton (on imagine facilement la crise d’apoplexie de l’office catholique de l’époque chargé de veiller aux bonnes mœurs du cinématographe !) .

C’est encore ce moment où Kiki trousse la jupe de Bichette pour lui flanquer une fessée (moment désopilant) où lorsque cette dernière demande au même de lui palper la poitrine afin de lui prouver qu’elle « en a » malgré le coton qu’elle enfile dans son soutien-gorge !

Outrageusement chaste et moralisateur, ce film n’en tourne pas moins entièrement autour des sujets les plus scabreux. Les demoiselles (qui sont censées avoir autour de 15 ans !) ne cessent de se demander comment se font les enfants et la plus mafflue d’entre elles va jusqu’à se planquer dans une penderie en espérant reluquer les ébats de sa cousine ! 

 

 

Cet écart entre l’innocence et le caractère édifiant de l’œuvre et sa réelle perversité (un peu à la manière des romans de la Comtesse de Ségur où notre brave rombière aime à faire subir les pires outrages à ses angéliques demoiselles) donne à ce mélo rustique suranné un peu de piquant.

Mais l’ensemble est absolument nul !

  

 

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