French connection (1971) de William Friedkin avec Gene Hackman, Fernando Rey

 

 

 

 

 

« Peter Yates et William Friedkin, ces deux artisans, ont en commun l’absence de style et d’avoir provoqué la surexcitation enthousiaste en glissant une longue cascade automobile dans des thrillers miteux (Bullit pour l’un, French connection pour l’autre). » Au risque de déplaire aux thuriféraires de l’auteur de l’exorciste auquel la cinémathèque française va prochainement rendre hommage (rires), je dois reconnaître que je me rangerais volontiers du côté de l’avis sévère de Manchette (ça faisait longtemps que je ne l’avais pas cité !) en ce qui concerne Friedkin. Les quelques films que j’ai pu voir de l’auteur ne m’ayant que peu emballé (c’est un euphémisme lorsque je songe à des navets comme Jade ou La nurse).

French connection, une de ses œuvres les plus renommées, ne m’a pas vraiment réconcilié avec le cinéaste. Plus qu’un film policier novateur, j’y ai vu un film assez tapageur annonçant d’une certaine manière le cinéma d’action contemporain où l’idée de mise en scène a laissé place à une surenchère d’effets spectaculaires et tape-à-l’œil. Mais venons-en à la trame du récit.

 

 

 

Nous y voyons Popeye (Gene Hackman, inquiétant et monolithique à souhait, irréprochable même si j’avoue le préférer dans des rôles plus subtils comme celui qu’il tient dans Conversation secrète, ce chef-d’œuvre de Coppola), un flic aux méthodes brutales traquer des trafiquants de drogue. Avec son co-équipier, il remonte jusqu’à une grosse filière française localisée à  Marseille…

Inspiré d’un fait divers, le film suit donc les pérégrinations de ce duo de flics de choc engagés pour démantibuler l’organisation criminelle.

Le style de Friedkin se veut brut de décoffrage : photo assez sale, montage nerveux ponctué par de nombreux faux-raccords, caméra portée à l’épaule pour donner un style reportage au film… Parti-pris qui aurait pu se révéler intéressant mais qui ne fonctionne que par alternance (plutôt rarement, en fait). Parce que lorsqu’il n’est pas dans la pure action, Friedkin se montre complètement plat, incapable de faire autre chose de la « réalité » qu’un décor vaguement sordide et pas très intéressant. J’admets qu’il y a deux ou trois scènes très réussies dans French connection , que ce soit le moment où Fernando Rey tente de semer Gene Hackman dans le métro par toute une série de subterfuges ou encore la fameuse séquence qui a fait la célébrité du film : celle où Popeye en voiture est lancé à la poursuite d’une rame de métro qui ne s’arrête désormais plus à chaque station. Dans cette scène, le découpage très « cut » et le montage parallèle de Friedkin font merveille et s’avèrent assez scotchant.

En tout, ça fait un quart d’heure de bonnes choses noyées au milieu d’une enquête qui m’intéresse à peu près autant que la hausse du cours du cuivre à la bourse de Tokyo !

 

 

 

Mais mon principal grief envers ce film n’est pas celui-là et concerne le cinéma de Friedkin dans son ensemble (mon intuition se fait de plus en plus prégnante). Une fois de plus, je trouve que le cinéaste manque d’ambiguïté.  Je crois avoir déjà cité l’exemple du médiocre Cruising où Al Pacino enquête sur des meurtres dans le milieu gay et sadomasochiste. Or l’homme qui infiltre ce milieu reste sans arrêt imperméable à ce qu’il voit, insensible aux gouffres qui s’ouvrent à ses pieds (l’inverse du beau film avec Clint Eastwood : la corde raide) Chez Friedkin, il y a le Mal absolu (songez à la figure du diable dans l’exorciste) et le Bien mais pas de « porosité » entre ces deux pôles. D’où le côté basique de ses mises en scène (le montage parallèle isole ici les Bons et les Méchants) et son adhésion sans condition à la cause du Bien, quelques soient les méthodes utilisées.

Pourtant, nous sommes un peu gêné d’être associé à ce flic antipathique et violent, plutôt primate et volontiers raciste. Lorsque Don Siegel filme l’inspecteur Harry, il ne nous fait pas avaler la couleuvre que son héros est tout blanc (au contraire). Dans French connection, jamais Friedkin ne remet en cause son flic et lui donne même raison contre sa hiérarchie qui voit d’un mauvais œil ses méthodes. 

 

 

 

Personnellement, ça me gêne et j’ai trouvé ce film assez déplaisant et, en tout cas, très surestimé …

 

 

 

 

 

 

 

Retour à l'accueil