She-devil (1989) de Susan Seidelman avec Meryl Streep, Roseanne Barr

 

Petit jeu amusant : trouvez pour chaque décennie un cinéaste qui fut célébré en grandes pompes pour avoir humé un peu de l’air du temps et qui, quelques années plus tard, a sombré dans le plus légitime oubli ou dans la plus terne des médiocrités. Pour les années 60, je citerais volontiers Vadim et Eric Rochant pour les années 90. Quand aux années 2000, gageons que Christophe Honoré occupe déjà la pole position dans la liste des cinéastes branchouilles surestimés que nos enfants ne connaîtront sans doute plus. Tous ces cinéastes « à la mode » sont déjà insupportables en temps normal alors imaginez les cinéastes « branchés » de la plus immonde décennie de tous les temps : les années 80 ! Eh bien Susan Seidelman fait partie de ces spécimens rares !

Je me souviens encore du succès de Recherche Susan désespérément et de son côté « hyper tendance » (Madonna, les émois sentimentaux de la jeunesse branchée…): j’étais trop jeune pour l’avoir vu en salles mais je l’ai découvert quelques années plus tard et l’ai trouvé absolument nul.

She-devil, c’est encore pire !

Pitch (employons le vocabulaire raffiné d’un rédacteur des Inrocks) : une brave mère de famille au physique ingrat (c’est peu de le dire) décide de se venger froidement de son mari comptable lorsque celui-ci s’éprend d’une belle et richissime romancière à succès (Meryl Streep, en Barbara Cartland d’opérette).

A quelques niveaux que nous prenions ce film, il s’avère lamentable.

Sur le fond, il dégage de vieux relents de féminisme rance puisque la mère de famille décide de prendre en main son destin et de châtier un mari qui cumule les défauts de la gente masculine (lâcheté, priapisme, bêtise…). D’un autre côté, la cinéaste prend parti pour le boudin contre les belles femmes (forcément niaise, superficielle et affublée d’un petit caniche ridicule). C’est la revanche de la ménagère anonyme contre les déesses hollywoodiennes. Misère de ce féminisme aigre et mesquin, dégorgeant autant de frustrations et de ressentiments qu’un discours d’une chienne de garde !  Jamais nous ne nous identifierons à la femme délaissée et c’est le premier échec du film que de rendre Roseanne Barr (actrice au demeurant exécrable) totalement antipathique alors que malgré sa niaiserie supposée, Meryl Streep est beaucoup mieux et bien plus attachante.

Rarement j’ai vu un film qui fonctionne autant à rebrousse-poil. Ca aurait pu finir par le rendre intriguant sauf que Seidelman se montre incapable de donner un semblant de vie à sa collection de caricatures et barbotte pendant une heure et demie dans la fange de la vulgarité.

Viens alors le moment d’envisager le film au niveau du « rire » qu’il provoque puisque c’est censé être une comédie. Là encore, le résultat est affligeant : pas de rythme, pas de gags, pas de répliques cinglantes, pas de construction de situations comiques…L’horizon que tente d’atteindre la cinéaste, c’est celui de la sitcom (outre l’héroïne de la série Roseanne, que je n’ai jamais vu, on repérera dans un second rôle de gigolo latinos un des acteurs de l’ineffable feuilleton Santa Barbara) et elle ne parvient qu’à en restituer l’indigente platitude formelle.

Vulgarité, bêtise et mesquinerie sont les seuls mots qui viennent à l’esprit pour qualifier cette affligeante pochade pas drôle.

Nous n’épiloguerons donc pas plus…

 

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