Charmante famille (1937) d’Otto Preminger avec Ann Sothern, Jack Haley

 

 

 

Le câble est décidément une belle invention. D’une part, cela permet à un petit provincial comme moi de découvrir des films invisibles ailleurs. D’autre part, cela nous épargne de sortir dans le froid pour affronter les sorties cinématographiques du moment dont l’atrocité ne trouve un équivalent possible que dans les vagissements gutturaux de la rappeuse Diam’s !

Vous vous demanderez peut-être quel plaisir je peux avoir à regarder un film de 1937 dont j’ignorais jusqu’à hier l’existence (il n’est même pas recensé dans le guide des films de Tulard) et dont les interprètes ne m’étaient pas plus connus. Et bien c’est qu’il est signé Otto Preminger et que c’est toujours un bonheur de découvrir les œuvres de jeunesse d’un immense génie qui signera par la suite des films aussi beaux qu’Un si doux visage, Autopsie d’un meurtre (quelle merveille !), Rivière sans retour (Ah, Marilyn !), Mark Dixon, détective, le mystérieux Docteur Korvo et surtout Laura, avec l’Etoile parmi les étoiles : Gene Tierney.

 

 

 

 Dans Charmante famille, nous suivons les déboires d’un avocat chargé de la vente d’un terrain au profit d’une société de chasse et qui doit, pour ce faire, obtenir la signature des propriétaires, à savoir tous les membres d’une famille de dingues  (de l’oncle qui considère la civilisation comme un échec et vit comme un homme préhistorique au petit morveux de 12 ans qui a déjà obtenu son bac). Le ton est à la comédie, genre pourtant peu familier du cinéaste. Tout en restant une œuvre mineure, Preminger s’en tire avec les honneurs : un rythme qui ne faiblit pas, des répliques qui fusent à cent à l’heure, des comédiens inspirés font que même si on ne rit pas à gorge déployée, on conserve tout au long de la projection un sourire amusé.

Les portraits des personnages sont assez savoureux, rappelant un peu (toutes proportions gardées) la joyeuse communauté familiale utopique de Vous ne l’emporterez pas avec vous de Capra. Petits génies en herbe, artiste incompris (le peintre « post-surréaliste » est très drôle), savants lunaires et demoiselle frivole et insouciante composent cette famille avec qui l’avocat va devoir se démener. L’humour naît à la fois du décalage loufoque entre les deux univers (il est accueilli par un gigantesque ours en peluche que le paterfamilias a réussi à robotiser) , des brimades que Junior (qui par ailleurs cite Lombroso et Darwin !) fait subir à notre pauvre bonhomme et surtout d’un sens de la répartie qui inscrit parfaitement Charmante famille dans ce courant si fécond de la « screwball comedy » américaine. 

 

 

 

Je n’ai pas grand chose de plus à ajouter sur ce film qui est avant tout un parfait divertissement (bouclé, ô bonheur, en 1 heure 20) et qui ménage même une charmante romance sentimental et un intermède musical. Cela ne veut pas dire que c’est du tout venant et que la facture est anonyme. Au contraire, dans l’élégance de certains mouvements de caméra (les fameux travellings de Preminger) , on sent déjà pointer le style du maître. Mais pour l’heure, il s’amuse et nous amuse.

Nul ne songerait à s’en plaindre…

 

 

 

 

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