La science des rêves (2006) de Michel Gondry avec Charlotte Gainsbourg, Alain Chabat, Emma De Caunes, Miou-Miou

 

 

Mon ordinateur ayant dû subir une grave opération chirurgicale (mais vous êtes au courant si vous venez d’ici. Toute cette histoire est rigoureusement authentique même si les héros ne sont pas forcément ressemblants. Boulet ! salaud ! Tu m’as fait prendre 20 ans!). Cette interruption involontaire me permet de vous épargner une nouvelle note sur Ozon (Gouttes d’eau sur pierres brûlantes, dégotté dans une version DVD cheap) et sur cette petite merveille de perversité qu’est Pauline à la plage de Rohmer pour évoquer uniquement les sorties récentes.

N’ayant que très peu apprécié le premier film de Michel Gondry (cet exercice de style ultra-maniéré qu’était Human nature avec une Patricia Arquette couverte de poils), je ne suis pas allé voir Eternal Sunshine… dont la petite aura critique m’a cependant donné envie de renouer avec le cinéaste malgré quelques appréhensions liées au commentaire critique d’un certain Boulet dont je vous ai parlé plus haut (« Mhouais, c’est gentil, c’est mignon ! Ca ressemble un peu à Amélie Poulain » Le genre de réflexion qui me fait prendre les jambes à mon cou !)

 

 

Pour son troisième film, Gondry est revenu en France et suit les aventures d’un jeune homme, Stéphane,  dont le père vient de mourir d’un cancer. Sa mère lui a trouvé un job à Paris mais en en lieu et place du travail artistique dont il rêvait, il se voit confier la conception d’ineptes calendriers et devine que sa mère a trouvé ce subterfuge pour le faire revenir auprès d’elle. Parallèlement, il fait connaissance avec sa voisine de pallier (Charlotte Gainsbourg) et en tombe amoureux. Enième comédie sentimentalo-parisienne ? Evidemment non puisque comme le titre du film l’indique, l’élément onirique y occupe une place primordiale. Stéphane passe le plus clair du temps à rêver et finit même par ne plus savoir véritablement distinguer ses songes de la réalité. C’est l’une des plus jolies idées du film : cette manière de montrer comment chacun d’entre nous aimerait broder sa vie dans l’étoffe de ses rêves. Gondry prend au pied de la lettre l’expression « se faire des films » et montre Stéphane en animateur de télé de sa propre petite station artisanale ; se projetant dans les situations de son quotidien pour en résoudre les problèmes sans la moindre difficulté (faire accepter son projet artistique, séduire Stéphanie sa voisine, éclaircir sa situation familiale…). La manière dont le cinéaste lance des ponts entre un univers onirique assez délirant et une réalité où l’on prend plus facilement des coups est plutôt habile et rythme le film de manière agréable.

Mais, puisqu’il faut être franc jusqu’au bout, je dois vous avouer que cette Science des rêves ne m’a pas totalement convaincu malgré le plaisir indéniable que j’y ai pris.

 

 

D’après moi, Gondry est moins un artiste qu’un habile « créatif » (mot qui me fait horreur à peu près autant que le terme « tsunami » ou que les gens qui répondent « tout à fait » au lieu de « oui » !). Il pense moins en terme de mise en scène qu’en terme d’idées visuelles et réduit souvent ses scènes oniriques à des petits clips indépendants qui n’arrivent pas vraiment à former quelque chose d’organique et d’incarné. Nous sommes loin des géniales logiques du rêve qu’arrivent à créer des gens comme Buñuel ou Lynch. En bon « créa » (inutile de rappeler que Gondry est un fils de pub et le plus branché des réalisateurs de clips) , le cinéaste donne toujours l’impression de s’adresser à une cible. S’il joue sur une dimension fantastique, il ne s’adresse néanmoins pas à la masse des ploucs avides d‘effets spéciaux numériques spectaculaires. La cible est ici le public « branché » qui raffole de ce côté bricolé et rétro (le style je continue ma collection de vinyles à l’heure du CD) qu’adopte Gondry. Les scènes de rêves sont réalisées avec de bonnes vieilles transparences et de l’animation image par image comme dans les dessins animés des pays de l’Est des années 70/80 (citez ici Svankmajer, ça fera bien !). Tout cela n’est pas laid et s’avère même assez inventif. Néanmoins, je n’arrive pas y voir du cinéma mais bel et bien de l’imagerie importée de la télévision (en mieux, je le concède).

Reste de très belles idées, des acteurs splendides et très bien dirigés (Charlotte Gainsbourg n’avait pas rayonné d’un tel charme depuis une éternité) et une dimension « comédie » qui est peut-être ce qui m’a le plus plu. Je pense notamment aux scènes de bureau où Stéphane est confronté à un Alain Chabat désopilant dans le rôle du gros beauf lubrique adepte des blagues les plus salaces. Ces moments sont vraiment très drôles et donnent une autre respiration à ce film assez joli (moins gnangnan que le best-seller de Jeunet sus-cité) mais un peu trop « tendance » à mon goût…

 

 

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